La Tribune Fonda n°245 explore les relations entre associations et collectivités territoriales, leurs évolutions et modalités.
Le dossier met en avant les enjeux d’une coopération réussie entre ces acteurs à l’échelle locale, les leviers à activer pour y parvenir et les difficultés rencontrées.
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Vous y trouverez chaque trimestre des éclairages inédits et inspirants sur les évolutions du monde associatif et de l’économie sociale et solidaire.
L’horizontalité, une condition pour faire société
Aborder les liens entre associations et collectivités en période d'élections municipales est en soi une évidence. Traiter ce sujet depuis 1981 est, sans aucun doute, l’une des marques de fabrique de la Fonda. En parallèle de ses travaux visant à construire une vie associative indépendante et reconnue, la Fonda a constamment cherché à faire reconnaître le rôle des associations sur les territoires. Pour cette raison, elle n’a cessé d’affirmer que « le dialogue avec la puissance publique était constitutif de relations saines permettant aux associations d’œuvrer efficacement1
».
Dans les années 1980, ce sont les grandes lois de décentralisation qui marquent la vie des collectivités. Aujourd’hui, associations et collectivités doivent tenir compte de nouvelles échelles dans leurs activités : l’Europe et la mondialisation, qui rebattent complètement les cartes de l’emboîtement territorial. Ces transformations n’altèrent en rien la pertinence du but initial de la Fonda, poursuivi depuis trente-huit ans : « témoigner de l’importance de la vie associative en tant que composante essentielle du tissu social2 ». Avec cette conviction que la vitalité associative est le ciment de la vitalité démocratique de notre société.
Sans s’inscrire dans une démarche partisane, la Fonda porte résolument ce message politique, marqueur du vivre ensemble. La cité (polis), comprise, selon la définition d’Aristote3 , comme une communauté de citoyens libres et autonomes, est au fondement de nos sociétés. Elle est au cœur de nos échanges économiques et politiques, ainsi que de nos liens sociaux. La dimension éminemment sociale de l’Homme est rappelée des siècles plus tard par Saint Thomas d’Aquin : « en tout homme, il y a comme un élan naturel à la vie sociale4 ».
De nos jours, les liens entre territoires et citoyenneté sont toujours aussi prégnants. Une étude commandée par le Mouvement associatif témoigne de l’importance des collectivités territoriales et de la vie associative qui en découle5 : neuf Français sur dix se disent satisfaits de la vie sur leur territoire. Et neuf Français sur dix considèrent également les associations comme des acteurs importants de la vie locale et de ce dynamisme. Il faut s’en réjouir.
Mais des signaux doivent nous alerter. La crise des « Gilets jaunes » exprime avec fracas une peur forte de déclassement – non sans fondement – de la part d’une partie de nos concitoyens. Les politiques sociales de notre pays ont largement servi d’amortisseur, mais la crise financière de 2008 a démontré à quel point notre pays, et l’Europe tout entière, étaient fragiles. « Les Français avaient coutume de se représenter leur pays comme un lieu d’exception dont les extraordinaires potentialités étaient provisoirement altérées par de mauvais gestionnaires.6 »
Pourtant, la temporalité du malaise est bien plus ancienne : « notre pays souffre d’un déséquilibre entre les espaces anthropologiques et religieux qui le constituent. Son cœur libéral et égalitaire, qui fit la Révolution, est affaibli. Sa périphérie, autrefois fidèle à l’idéal de hiérarchie et souvent de tradition catholique, est désormais dominante. Nos dirigeants, parce qu’ils ignorent tout du mode de fonctionnement profond de leur propre pays, aggravent sa condition par des politiques économiques inadaptées7 ». Le constat dressé sept ans plus tard par Jérôme Fourquet est sans appel : « dans ce contexte de fragmentation, l’agrégation des intérêts particuliers au sein de coalitions larges est tout simplement devenue impossible8 ».
Il y aurait là matière à désespérer… ou au contraire, à promouvoir le pouvoir d’agir des citoyens et à se réjouir de l’associativité dont fait preuve notre pays. Une société horizontale, qui inclut chacun et dont chacun est acteur, voilà sans doute notre espoir pour faire face aux crises sociales et environnementales qui sont devant nous.
- 1Voir à ce titre l’article de Jean-Pierre Duport et Jacqueline Mangin, « Associations – pouvoirs publics, poursuivre le dialogue » in La Cause des associations, 1976–2013, la Fonda, 2013.
- 2Article 1 des statuts de la Fonda.
- 3Aristote, La Politique, IVe siècle av. J.-C.
- 4Saint Thomas d'Aquin (XIIIe siècle), Commentaire du traité de la politique d'Aristote, ouvrage publié en 2017.
- 5Étude Ifop – Le Mouvement associatif, « Le bien-être territorial - Vivre sa citoyenneté sur son territoire », janvier 2020.
- 6Jacques Lévy, Réinventer la France – Trente cartes pour une nouvelle géographie, 2013, p. 8.
- 7Hervé le Bras et Emmanuel Todd, Le Mystère français, 2013, p. 7.
- 8Jérôme Fourquet, L'Archipel français, Naissance d'une nation multiple et divisée, 2019.