La Tribune Fonda n°240 explore les enjeux de la mesure d'impact social et de la création de valeur pour le monde associatif et de l'économie sociale et solidaire.
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Vous y trouverez chaque trimestre des éclairages inédits et inspirants sur les évolutions du monde associatif et de l’économie sociale et solidaire.
De la valeur des associations
Les termes d’« évaluation » et d’« impact » résonnent quotidiennement sans que l’on sache exactement quelle définition leur donner. Quand ils ne sont pas utilisés comme des antiennes censées apporter des réponses magiques aux enjeux de la transition économique des acteurs associatifs, ils sont brandis de manière anxiogène - ou pire sous forme d’injonction - comme une finalité en soi.
Les réformes successives de l’État depuis une dizaine d’années ont contribué à en brouiller le sens : les évaluations étant malheureusement d’abord perçues comme des outils employés pour la compression des services publics. Les exemples d’une mise en œuvre strictement comptable des évaluations sont légions. En Grande-Bretagne, des centres hospitaliers ont ainsi fait patienter des ambulances sur leur parking, afin de réduire les temps d’attente effectif en hôpital et d’éviter les pénalités prévues par le ministère pour l’absence de prise en charge dans un délai inférieur à quatre heures des patients arrivant aux urgences.
Si cet exemple témoigne d’une situation absurde, l’évaluation a cependant des vertus. Nous « vivons dans une ère de l’évaluation, de la mesure permanente et de la croyance en la vertu selon laquelle la publication de toutes ces données crée de la transparence » 1 . Alors que le secteur de l’économie sociale et solidaire pèse 10% de l’emploi, 110 milliards d’euros de chiffres d’affaires et mobilise 22 millions de bénévoles, n’est-il pas légitime de chercher à mesurer ses effets sur la société ? Se réclamer d’organisations capables de transformer la société nécessite de la méthode si nous voulons être pris pleinement au sérieux, en gardant à l’esprit que « tout ce qui est excessif est insignifiant2 » !
Les guides et les approches méthodologiques sont nombreux et entraînent avec eux des controverses, tant le sujet est vaste. C’est tout l’enjeu des travaux menés conjointement par la Fonda, l’Avise et le labo de l’ESS - en lien étroit avec nos écosystèmes – qui ont cherché à la fois à définir le but recherché lorsque nous décidons de mesurer notre impact et à proposer une approche méthodologique. Loin de nous l’idée de chercher à réduire la valeur sociale de l’ESS en litanie de chiffres. Il s’agit bien au contraire de rendre compte de la richesse d’un secteur trop souvent considéré en fonction de ses coûts plutôt que de ses apports.
Prenant appui sur les travaux de Michael Porter et Mark Kramer, Yannick Blanc a eu la brillante intuition de considérer l’ESS en tenant compte de son inscription dans des chaînes de valeur à l’échelle d’un territoire. Michael Porter, l’un des professeurs de management à Harvard des plus influents, a théorisé d’un point de vue business le concept de shared value (valeur partagée) selon lequel « la compétitivité des entreprises et la vitalité de leur environnement social sont dépendants3 ». Par parallélisme, un acteur social financé par la dépense publique ne recherche pas son efficacité pour lui-même mais pour contribuer à la création de valeur sociale.
Dit autrement, les associations sont des contributeurs de premiers plans à l’innovation sociale. Pour ne pas en rester à une dimension purement théorique et conceptuelle, la Fonda s’est lancée dans des expérimentations de terrain, qui permettront de mettre en avant ce potentiel innovant des associations et de décrire leurs mécanismes de création de valeur.
Loin de constituer un effet de mode, l’évaluation et la mesure d’impact sont des conditions indispensables à la réussite de l’atteinte de nos objectifs communs. Vouloir collectivement atteindre les ODD en 2030 nécessite des outils de mesure construits collectivement et patiemment, qui se situent au carrefour du contrôle, de la connaissance et de la transparence.