Hommage à Jean-Pierre Worms

Publié le Vendredi 12 juillet 2019 - 14:18
Membre depuis 1991 et président de la Fonda de 2004 à 2008, Jean-Pierre Worms est décédé.
JPWORMS
© Photo issue du site Ideas 4 Development


C’est avec une tristesse immense que la Fonda et l’ensemble de ses membres ont appris le décès de Jean-Pierre Worms, survenu dans la nuit de jeudi 11 à vendredi 12 juillet 2019. Il allait avoir 85 ans. 

Sociologue, homme politique et militant associatif, Jean-Pierre Worms a défendu toute sa vie les droits sociaux, la liberté associative et le pouvoir d’agir des citoyens. Il a été le président de la Fonda de 2004 à 2008.

La Fonda, ses membres, administrateurs et salariés, anciens et actuels, ont souhaité rendre hommage à cet homme de conviction et de combat qui, jusqu’à ses derniers instants, s’est indigné, a interpellé, agi et su mobiliser autour de lui les forces et esprits nécessaires pour défendre la démocratie et la justice sociale.

À travers la multiplicité de ses engagements intellectuels, politiques et associatifs, la vie de Jean-Pierre Worms témoigne d'une cohérence profonde, celle d'un humanisme inquiet et actif, cherchant inlassablement, dans le questionnement, la création et l'expérience, ce qui peut faire se rejoindre l'impératif de l'intérêt général et la capacité, pour chaque individu, d'exprimer et de déployer sa singularité. Jamais dupe des postures institutionnelles, toujours attentif à ce qui émerge dans la société, il aura été un homme de liens, de main tendue et de bras ouverts.

Visionnaire, enthousiaste, opiniâtre, Jean-Pierre Worms nous a inspirés et inspirera encore celles et ceux qui militent et qui ne se résignent pas.

Salut Jean-Pierre, et merci infiniment.

 

→ Découvrir les nombreux témoignages, souvenirs et messages en hommage à Jean-Pierre Worms qui nous sont parvenus.
 

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Né le 16 juillet 1934, Jean-Pierre Worms réalise une partie de sa scolarité en Angleterre à l’issue de la Seconde guerre mondiale et après le décès de son père Jean Worms, résistant et agent des services britanniques. Il obtient l’équivalent du baccalauréat de philosophie et poursuit ses études en sociologie à la Sorbonne, à Paris, mais également à l’Université de Liverpool, en Angleterre.

C’est étudiant que le jeune Jean-Pierre Worms s’engage dans ses premières luttes syndicales, en présidant successivement le Groupe d'études de philosophie puis la Fédération des Groupes d'études de Lettres de la Sorbonne, et enfin la Fédération nationale des étudiants en Lettres de France.

Comme sociologue, il étudie notamment les dynamiques locales de développement économique et d’emploi, mais également les relations entre l’état et les collectivités locales. Jean-Pierre Worms est recruté au CNRS (1962) et accompagne Michel Crozier dans la création du Centre de sociologie des organisations (1962-1964). Il y exerce jusqu’en 1977, avec un passage Berkeley et Harvard, aux États-Unis (1964-1966). Il prend la direction du Centre d’études sociologiques (1977- 1981), puis quitte ses fonctions de sociologues pour exercer son mandat parlementaire. Il reviendra au CNRS et Centre de sociologie des organisations en 1993 pour y achever sa carrière en 1999.

Ses nombreuses publications capitalisent, sur le plan de la théorie sociologique, les acquis de son expérience politique, notamment sur la crise de l'État et de la représentation, sur la crise du modèle français d'intégration sociale, et enfin sur le  modèle républicain face au développement de sociétés multiculturelles.

En effet, Jean-Pierre Worms exerce en parallèle de nombreuses responsabilités électives, aux niveaux local, national et européen. Il devient ainsi conseiller municipal de Mâcon (1977-1993), conseiller général de Saône et Loire (1979-1985) et conseiller régional de Bourgogne (1981-1986). Il siège également à l’Assemblée nationale comme secrétaire de la Commission des lois (1981-1993). Enfin, il rejoint le Conseil de l’Europe (1988-1993) comme membre de la Commission des réfugiés, des migrations et de la démographie, et de la Commission des questions juridiques et des droits de l’Homme. Dans ce cadre, après trois ans de consultations, il rédige et fait adopter par l'Assemblée du Conseil de l'Europe un projet de protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'Homme portant définition et protection des droits des minorités nationales.

Par ailleurs, Jean-Pierre Worms s’investit toute sa vie dans l’action associative, à l’échelle locale ou nationale.

Il exerce ainsi différents mandats : au sein du Commissariat général du Plan, institution ayant existé jusqu’en  2006 chargée de définir à titre indicatif la planification économique du pays (devenue aujourd’hui France Stratégie), à la Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (Datar), ayant existé de 1963 à 2014, et au sein d’autres associations para-publiques.

Préoccupé par les questions de développement local et d’emploi, artisan du décloisonnement des approches et des partenariats entre les différents acteurs de la société, il préside ou administre différentes associations favorisant les initiatives locales, la rencontre des acteurs du développement économique sur les territoires (collectivités territoriales, établissement publics, entreprises, professionnels, associations, État...) et le partage des bonnes pratiques et des expériences.

Il est ainsi élu, entre autres, alternativement président et vice-président du réseau Initiative France (à partir de 1989, il en est également cofondateur), vice-président du Centre de rencontres et d'initiative pour le développement local (1990-1996), président et vice-président du Comité d'information et de mobilisation pour l'emploi (depuis 1993).

Mais son principal fait d’armes associatif se trouve dans la défense de la démocratie, la promotion de la citoyenneté et le développement du pouvoir d’agir des individus  et des collectifs.

C’est à ce titre qu’il adhère à la Fonda en 1991, en devient membre du bureau en 1993, puis président de 2004 à 2008. Il met alors tout en œuvre pour développer le lien entre les responsables des principaux réseaux associatifs français, afin de valoriser et promouvoir l'apport des associations à la cohésion sociale, à l'engagement civique et à la qualité démocratique de la société. Il reste membre invité au conseil d’administration et participe aux différents événements de l’association jusqu’à aujourd’hui.

Jean-Pierre Worms est également membre de la « Maison Grenelle », rassemblant des associations et réseaux militant pour un renouveau de la citoyenneté (1993-2002), et président de l’Observatoire de la démocratie locale mis en place à Paris pour évaluer et conforter le développement de la participation des parisiens à la vie de la cité (2005-2008). Il cofonde en juin 2010 le collectif Pouvoir d’agir, composé de personnes, associations locales et réseaux nationaux engagés dans la lutte contre l’exclusion sociale et politique. Au niveau international, il préside le East-West Parliamentary Practice Project (1990-2000), programme européen d’échange d'expériences et de savoir-faire pratiques entre les parlements démocratiques plus expérimentés du monde occidental et les nouveaux parlements démocratiquement élus d'Europe centrale et orientale.

Enfin, tout au long de sa vie, Jean-Pierre Worms milite pour les droits de l’Homme, au niveau national, comme adhérent de toujours et membre du Comité central de la Ligue des droits de l’Homme (1996- 2003), et européen, comme secrétaire général de Trans-européennes, réseau pour la Culture en Europe (1994-2003).