Engagement

Réinventer les partis comme terreau d'engagement politique

Tribune Fonda N°258 - Cartographier l’engagement - Juin 2023
Pauline Véron
Pauline Véron
La politique est un engagement traditionnel dans la vie de la Cité. Pourtant les partis politiques et les urnes sont désertés. Pauline Véron, ancienne élue et actuelle co-présidente de Démocratie Ouverte, esquisse dans cette tribune les racines de cette désaffection qui ne signifie pas disparition de tout engagement politique.
Réinventer les partis comme terreau d'engagement politique
Table-ronde sur l’Accord de Paris au congrès du Parti socialiste à La Rochelle le 24 août 2019 © François Lafite / Parti socialiste

Pourquoi s'engager en politique ?

L’engagement d’une manière générale est très fort dans notre société, et il prend diverses formes qui peuvent aller jusqu’à l’engagement politique. Que veut-dire s’engager en politique aujourd’hui ? C’est prendre position, mais c’est aussi au-delà, accomplir quelque chose. Il y a la notion d’action.

Selon une récente analyse d’Adelaïde Zulfikarpasic pour la Fondation Jean Jaurès, 28 % des Français considèrent l’engagement politique comme un moyen efficace pour défendre ses convictions, dont 41 % chez les 18-24 ans1 .

Pendant longtemps, s’engager politiquement signifiait adhérer à un parti politique. Ce n’est plus le cas, l’engagement politique est à présent synonyme d’action pour une ou des causes.

On est plus volontiers un activiste qu’un militant, même si les deux identités ont toujours existé et se sont parfois confondues, mais c’est moins le cas.

Dans le militantisme politique, il y a un aspect plus global. Plutôt que d’agir pour une cause spécifique, il s’agit de contribuer et d’agir pour un projet de société qui cherche à identifier puis à répondre à l’ensemble des problèmes rencontrés par la société. Cela permet aussi de se former.

En effet, un parti politique est une forme d’université populaire. Entrer dans un parti politique c’est s’ouvrir et se former à une multitude de sujets dont vous ignoriez les tenants et les aboutissants. Et c’est en cela que les partis politiques peuvent aussi être des lieux d’émancipation pour les individus. Ce sont également des lieux de socialisation, de mixité sociale et générationnelle.

La déstructuration du monde politique

S’ils sont des lieux d’action, de socialisation et de formation, pourquoi les partis politiques souffrent-ils d’une telle désaffection ? En 2021, 2 % des Français déclaraient être membres d’un parti2 .

La fin des partis politiques tels que nous les connaissions trouve une partie de ses racines dans la fin des grandes idéologies. Nous vivons encore dans la désagrégation d’un monde, celui issu de la Guerre froide, fondé sur deux visions radicales du monde qui ont structuré la vie politique jusqu’à la chute du mur de Berlin. Nous sommes en train de construire un nouveau monde politique, mais il n’est pas encore stabilisé.

Les grandes idéologies ont déçu, par ce qu’elles ont accompli ou au contraire par ce qu’elles ont échoué à faire advenir. De cette déception est né un profond désenchantement que nous observons aujourd’hui et qui a emporté dans la foulée tout ce qui relevait de la structuration idéologique.

C’est aussi le constat du défaut d’efficacité du politique qui a eu cette conséquence. Il y a une volonté d’agir plus forte, qui soit plus efficace, compte tenu de l’urgence de certains sujets comme la catastrophe du changement climatique.

Or notre société a besoin de réflexions et de débats politiques pour construire de nouvelles propositions de « contrat social », les structurer et permettre aux citoyens de se positionner.

Il y a donc un grand enjeu à imaginer et construire de nouvelles formes de partis politiques qui conviennent aux citoyens d’aujourd’hui, car c’est un des outils indispensables d’une démocratie. Il est temps de les reconstruire sur de nouvelles fondations.

  • 1Enquête BVA pour la Fondation Jean Jaurès. Adelaïde Zulfikarpasic (Fondation Jean-Jaurès), « Les Français et l’engagement », octobre 2021, [en ligne].
  • 2Enquête BVA, Ibid.
Analyses et recherches