Associations et démocratie

Mieux accompagner les transformations socio-économiques du secteur associatif

Tribune Fonda N°197 - Une politique associative - Juin 2009
La Fonda
Note d'aide au débat sur les pistes de structuration de l'accompagnement du monde associatif au vu de ces profondes mutations.
Mieux accompagner les transformations socio-économiques du secteur associatif

Les pouvoirs publics ont joué et jouent toujours un rôle déterminant dans le développement et la structuration du secteur associatif. Par les outils juridiques et financiers mis en place (ex. Fonjep…), par les moyens donnés dans chaque secteur pour instituer une représentation associative, les différents ministères ont cherché à favoriser la professionnalisation des associations et ainsi à enrichir leur contribution à la construction de l’action publique.

En introduction de cette note, nous rappelions combien l’évolution de la société implique pour l’état et les collectivités publiques de développer davantage des approches transversales. Au cours des vingt dernières années, les exemples sont nombreux pour illustrer l’intérêt de ces démarches. Les politiques de l’emploi et de lutte contre l’exclusion ont ainsi mobilisé des associations de tous secteurs pour aider à l’insertion socio-professionnelle de publics en difficulté. Nœud de relations sociales, les associations sont détentrices d’une expérience et d’une compétence insérante qui permet aux salariés concernés de réacquérir le capital social indispensable à leur rebond. De plus, les associations développent des activités et des métiers de la relation, qui sont devenus le cœur du développement moderne de nos économies. C’est ce qui explique, pour une large part, le fort développement de l’emploi associatif de ces trente dernières années. Enfin, nous pouvons constater que les associations développent des projets de plus en plus transversaux au croisement de différentes thématiques (culture et social, économie et social…) mobilisant des ressources de diverses origines (publique-privée, locale-nationale…).

Dans un tel contexte, s’il reste déterminant de maintenir une action de consolidation sectorielle, il est impératif de progressivement l’enrichir d’outils transversaux pour accompagner les mutations socio-économiques d’un ensemble dont la première caractéristique est la diversité. Des initiatives éparses, mais significatives, montrent l’intérêt d’aller dans ce sens : les Dla, France Bénévolat, les maisons des associations…

Sur ce point, nous avons identifié quelques pistes à explorer prioritairement :

Renforcer l’accompagnement territorialisé des associations

La mise en place du Dla constitue une réelle avancée, même si les conditions de sa mise en œuvre on pu faire l’objet de débat. L’étude réalisée par la Fonda pour la Cpca a montré la nécessité d’articuler davantage au plan territorial l’ensemble des démarches d’accompagnement existantes.

En prenant l’exemple d’expériences réalisées dans certaines régions, les centres régionaux de ressources d’accompagnement (C2RA) pourraient jouer un rôle central dans ce type de démarche. En recensant les dispositifs et pratiques existant sur un territoire et en favorisant leur cartographie, en aidant à la mutualisation des pratiques, il permettrait ensuite aux différents acteurs de construire et négocier des complémentarités. L’objectif serait de construire un maillage du territoire permettant à chaque association de trouver la ressource d’accompagnement dont elle a besoin. Ces complémentarités et mutualisations à construire et à renforcer doivent permettre aussi de professionnaliser les acteurs afin qu’ils aident les associations à exprimer dans une demande leurs besoins, point de passage obligé pour bâtir un plan d’accompagnement adapté.

Mutualiser les ressources existantes

À chacune des réunions que nous organisons, nous devons faire le constat que de nombreux responsables associatifs sont confrontés à un déficit d’informations sur des questions « simples et pratiques ». Sur des questions de base (juridiques, comptables ou financières, …), ils n’arrivent pas à trouver aisément une réponse précise, soit que les réseaux auxquels ils appartiennent ne disposent pas en interne de la compétence nécessaire, soit parce qu’en dehors des réseaux, ils n’ont pas accès à cette réponse faute d’adhésion.

L’exemple des chambres de commerce et d’industrie ou d’initiatives propres à certains secteurs économiques, montre pourtant combien le fait de disposer d’un dispositif d’information individualisé est précieux. Nous pourrions donc imaginer qu’il serait utile de développer une plateforme téléphonique de conseils juridiques et économiques ouverte à toutes les associations. Articulée avec les dispositifs d’accompagnement et les réseaux associatifs, elle permettrait de les décharger d’une fonction d’information individualisée technique et primaire tout en renforçant la professionnalisation du conseil en la matière. Par la mutualisation de ressources existantes, par la mobilisation de nouvelles technologies, il serait possible, par exemple, qu’une association qui appelle ou interroge par internet, une fédération ou une structure d’accompagnement, soit mise en relation avec cet outil commun. Cela permettrait aussi pour le mouvement associatif de constituer un pôle d’expertise très performant sur des sujets quotidiens et transversaux.

Une direction de la Vie associative, en partenariat avec les collectivités territoriales, la Caisse des dépôts et les réseaux associatifs, pourrait étudier la faisabilité d’une telle démarche, par exemple en mobilisant l’expertise acquise par l’Avise.

Les nouvelles technologies

Elles accompagnent et impulsent les transformations de nos rapports sociaux. Elles bousculent les modes de construction de l’action collective permettant des mobilisations déterritorialisées, des fonctionnements plus horizontaux, un partage plus important des savoirs. Elles transforment en profondeur la plupart des organisations. Elles contribuent aussi à modifier notre rapport au savoir et à l’expertise. Leur appropriation par les associations constitue un réel enjeu politique pour les associations. Or, nous devons faire le constat qu’elles peinent à en tirer tout le potentiel. La Fondation de France avait financé des démarches significatives en la matière. L’action d’associations telles que Vecam, l’April ou encore celle de Fing montre l’intérêt qu’il y aurait à aider le secteur associatif à se saisir pleinement de ces nouveaux enjeux. Une mission pourrait être confiée au Cnva sur cette question, tout comme il pourrait être utile de créer au sein de la direction de la Vie associative une mission Nouvelles technologies – nouveaux réseaux – nouvelles associativités.

Accompagner les transformations du rapport de individu au collectif

Enfin, nous devons constater qu’il est nécessaire de pouvoir accompagner les transformations du rapport de l’individu au collectif. Salariés et bénévoles instituent de nouveaux modes de relation avec les associations exigeant la preuve de leur apport et contribution, attendant de leur part une prise en compte importante et un accompagnement. Parallèlement, nous pouvons aussi constater que les frontières sont plus poreuses entre les statuts, les mobilités plus fortes. Si la réponse à ces phénomènes appartient à chaque organisation, la pression démographique qui s’exerce sur le mouvement associatif oblige le secteur et ses partenaires à réfléchir aux cadres à mettre en place. En effet, le fort renouvellement (le turn over) des salariés associatifs pose la question des modes de transmission des projets et des valeurs. La disponibilité de nouveaux bénévoles retraités, parfois anciens salariés associatifs, constitue une ressource à mobiliser.

L’enjeu n’est pas uniquement économique, il touche à la nature et à la culture future du mouvement associatif. L’ensemble des acteurs, et en particulier l’Etat, doit donc se saisir de ces questions et construire les outils pour permettre d’accompagner ces importantes mutations. Il serait ainsi utile :

  • de rapprocher davantage les politiques de l’emploi, de la formation et de soutien au bénévolat et au volontariat, afin de favoriser les parcours transversaux. La diffusion du Passeport bénévole de France Bénévolat constitue une démarche intéressante de ce point de vue ;
  • de développer des outils de transfert de compétences de savoir faire au sein du mouvement associatif (ex. de l’expérience Tsf de l’Avise, ou du parrainage dans le champ de la création d’entreprise ou de l’insertion professionnelle…) ;
  • de favoriser l’articulation entre engagement citoyen et vie professionnelle en lançant une nouvelle réflexion sur différents outils existants ou à créer : le congé de représentation, le mécénat de compétence…

 

En conclusion

Il nous semble utile de rappeler que la présente note n’a pas d’autre vocation que d’aider au débat entre les acteurs. Elle est une « feuille à idées » que chacun est libre de s’approprier, critiquer ou rejeter comme bon lui semblera.

Mais, nous souhaitons faire part de notre conviction de la nécessité pour l’état et les pouvoirs publics de réviser en profondeur leur politique associative pour accompagner les bouleversements sociétaux qui se profilent. L’enjeu vise tout autant la qualité de la vie démocratique que la recherche de l’efficacité de l’action publique. Pour y parvenir les actions à construire sont nombreuses et vont dans de nombreuses directions. Pour permettre un pilotage de ces évolutions, notre proposition s’articule autour d’une idée : créer davantage de transversalité par la mise en place d’une direction de la Vie associative dont les missions, la taille et les moyens d’intervention lui permettraient de jouer un rôle significatif et de peser dans les arbitrages.

Bien évidemment, la question du rattachement ministériel n’est pas anodin mais seconde si cette direction de la vie associative est dotée du rôle interministériel que nous décrivons : pilier de la connaissance associative, chargé de la coordination administrative.

 

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