Engagement

Les angles morts de la société de l’engagement

Destin Commun
Et Laurence de Nervaux, Raphaël LLorca
À l’automne 2024, Destin Commun a mené pour la Fonda une enquête auprès des « oubliés de l’engagement » en animant et analysant deux focus groups. Laurence de Nervaux et Raphaël LLorca, respectivement directrice et expert associé de Destin Commun, présentent les enseignements clés de cette étude sur les valeurs et valorisation de l’engagement, les motivations de l’engagement et freins, et les irritants et défis autour de l’engagement.

Depuis 2022, La Fonda a initié un important exercice de prospective participative : intitulé « Vers une société de l’engagement ? ». Il a pour vocation de proposer une réflexion sur l’avenir de l’engagement, permettant ainsi de répondre aux préoccupations des responsables associatifs qui sont confrontés à de nombreux défis. 

À l’occasion de la tenue de son Université de prospective le 9 octobre 2024, La Fonda a mis en débat les quatre scénarios prospectifs qu’elle a identifiés pour l’avenir de la société de l’engagement à l’horizon 2040, en se fondant notamment sur les résultats d’un questionnaire en ligne auto-administré auprès de ses partenaires. 

→ Lire les résultats du questionnaire

En complément, Destin Commun a mené un travail spécifique auprès de publics considérés comme éloignés du monde de l’engagement, et traditionnellement plus difficiles à atteindre. Avec un objectif : sonder les angles morts de la société de l’engagement. Pour mieux en cerner les attentes et les préoccupations, l’approche qualitative a été retenue : elle permet de connaître plus finement et d’approcher avec plus de granularité le profil de celles et ceux que l’on perçoit comme « désengagés », ou bien - défi spécifique - qui seraient engagés selon un système de valeurs radicalement différent de celui dans lequel La Fonda et l’essentiel des acteurs qui représentent l’écosystème de l’engagement associatif se reconnaissent. Surtout, l’approche méthodologique spécifique de Destin Commun permet de croiser les indicateurs socio-économiques et démographiques traditionnellement mobilisés dans l’analyse des déterminants de l’engagement, avec des éléments permettant de cerner leurs systèmes de valeurs, leurs perceptions, leurs peurs et leurs aspirations. Que signifie pour eux « s’engager » ? Quels sont les moteurs et les freins de l’engagement ? Quelle est leur perception des acteurs engagés ? De leur point de vue, à quoi ressemble l’avenir de l’engagement ? 

Autant de questions auxquelles la grille de lecture développée par Destin Commun, fondée sur la recherche en psychologie sociale, permet de répondre. Cette segmentation attitudinale de la société française a été construite selon la méthode du clustering à partir d’une batterie de plus de soixante questions relatives aux fondements moraux, aux orientations psychologiques et aux appartenances de groupe. Elle permet de distinguer six grandes familles de Français, toutes très homogènes en termes de valeurs et de visions du monde : les Militants désabusés, les Stabilisateurs, les Libéraux optimistes, les Attentistes, les Laissés pour compte et les Identitaires. 

La méthodologie choisie pour cette étude qualitative a mobilisé la réalisation de deux focus groups de deux heures, les 17 et 18 septembre 2024, avec des 2 représentants de deux familles (une famille par groupe) : les Laissés pour compte et les Identitaires. Ces deux groupes ont été choisis car ce sont les plus marqués par une forme de pessimisme et de déclinisme : ils considèrent très majoritairement que notre pays va dans la mauvaise direction, qu’ils sont les perdants des évolutions en cours, et même, pour une grande partie d’entre eux, que nos différences sont trop importantes pour que nous puissions continuer à avancer ensemble. Ces deux groupes diffèrent par les profils qui y sont majoritaires : les Laissés pour compte sont souvent d’âge moyen, et les femmes y sont plus nombreuses, tandis que les Identitaires sont plus âgés et majoritairement des hommes. Ils diffèrent aussi dans leur attitude à l’égard des étrangers et de l’immigration, les Laissés pour compte conservant une attitude un peu plus ouverte et empathique, tandis que les Identitaires ont une vision plutôt nativiste de l’appartenance à la société française. Ils se rejoignent en revanche par leur attachement à la justice et à l’ordre. Enfin, les données recueillies par Destin Commun sur les différentes dimensions de l’engagement (signer une pétition, participer à une manifestation, appartenir à une association, faire un don, mais aussi aider son voisin) établissent une différence entre eux : les Laissés pour compte sont un des groupes déclarant le moins d’engagements, tandis que les Identitaires sont plus engagés que la moyenne. 

Chacun des deux groupes de discussion a réuni six personnes, le principe d’homogénéité des profils limitant l’auto-censure et permettant une parole plus libre. Les discussions se sont tenues dans un format de conversation guidée, mais très libre, où chacun a pris la parole spontanément et réagi aux propos des autres. Cette note a pour vocation de restituer de façon synthétique les principaux enseignements recueillis. Les dix enseignements clés sont ici organisés en trois grandes parties : valeurs et valorisation de l’engagement, motivations de l’engagement et freins, irritants et défis autour de l’engagement.

→ Découvrir les résultats de l'étude

Étude