Engagement

La co-formation, tout au long de ma vie professionnelle

Tribune Fonda N°234 - L’engagement associatif, source d’apprentissages - Juin 2017
Hélène Eveleigh
Retour sur un parcours de vie où l'engagement dans un mouvement pédagogique a compensée la formation professionnelle insuffisante.

Entrée à l’Éducation nationale à la fin des années 1970, j’ai eu très peu de formation après ma réussite au Capes de lettres et je me suis vite rendue compte que mes connaissances littéraires et grammaticales ne suffisaient pas : comment faire en classe ? Je me sentais très démunie et souvent en difficulté, notamment pour évaluer mes élèves et prendre en compte leurs différences. Ma relation aux élèves était bonne, mais j’étais parfois un peu débordée par le groupe classe. Heureusement, j’ai vite trouvé un mouvement pédagogique, le Crap, et sa revue, Les Cahiers pédagogiques, grâce auxquels j’ai fait des découvertes déterminantes.
 

La pratique des Cahiers pédagogiques

J’ai alors pris l’habitude de retrouver ses militants presque chaque été pour la semaine des Rencontres : une semaine de travail en ateliers, une semaine d’échanges et de réflexions stimulantes. Comme participant, on peut ainsi explorer un thème dans un petit groupe co-animé par deux collègues qui ont creusé la question et organisé le déroulement des séances – mais qui ne se posent pas en spécialistes.

C’est le groupe qui va avancer, tâtonner, approfondir et aboutir à une production qui pourra servir à chacun, dans ses classes, à la rentrée suivante. C’est ainsi que je me suis formée, notamment, au travail de groupe, à l’interdisciplinarité ou à la différenciation pédagogique. J’ai petit à petit osé me lancer dans l’animation car chaque binôme d’animateurs comprend un ancien et un nouveau, selon un principe extrêmement formateur et rassurant ! J’ai aussi beaucoup appris en faisant de l’analyse de pratiques, selon un protocole très cadré qui amène à faire des hypothèses variées et à apporter différents éclairages sur une situation professionnelle difficile exposée par l’un des participants. Le groupe élabore une analyse, sans jugement, et non une réponse toute faite.
 

Ces principes de co-formation ont marqué la suite de ma vie professionnelle.


Quand la formation continue s’est développée dans les académies, je me suis trouvée à l’aise sur certains thèmes proposés mais je n’étais pas toujours d’accord avec les modalités de travail proposées par les formateurs. J’ai néanmoins rejoint des équipes de formation à l’IUFM de Créteil, quand j’ai pu proposer ce que j’avais appris et fait au Crap. Ainsi, je tenais au principe de la co-animation face à un groupe de professeurs stagiaires, afin de leur faire découvrir le travail de groupe et pour éviter la formation frontale magistrale et « modélisante ». J’ai aussi tenu bon sur le principe de l’analyse des situations : s’entraîner à analyser des situations difficiles, permet peu à peu de se former, dans un groupe un peu stable, à animer soi-même des séances, ce que j’ai proposé à des professeurs stagiaires volontaires.

Avec un peu de recul (puisque je suis depuis peu retraitée), je pense que ce que j’ai appris d’essentiel et qui a nourri ma façon d’enseigner, ma façon de travailler avec des collègues et ma façon de former de jeunes enseignants ou d’accompagner des enseignants en difficulté, a toujours été éclairé par ces principes de co-formation entre pairs, découverts dès les débuts de ma carrière lors de ces rencontres pédagogiques.

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