Parmi les 1 370 000 associations en activité en France, seuls 10,5 % emploient un ou des salariés, un taux constant depuis le début des années 20101 . Dans un contexte incertain, qui repose presque intégralement sur autrui, les associations vivent grâce à l’implication bénévole.
Ces Français qui s’engagent de manière désintéressée, le font tout aussi bien pour prendre part à la société, que pour eux. En effet, un objectif de satisfaction personnelle est prégnant dans le bénévolat, et ce depuis de nombreuses années2 .
Toutefois, dans les associations employeuses, les relations entre salariés et bénévoles ne se passent pas toujours sans heurts. Comment les surpasser ? Quel est le rôle du numérique, et plus spécifiquement de la communication en ligne, pour fidéliser des bénévoles et en attirer de nouveaux ?
Les évolutions de l'engagement bénévole
En 2018, près de 22 millions de personnes en France s’engageaient 3 , au sein d’une association, d’un syndicat, d’une mutuelle ou d’un parti politique. En 2023, le volume du bénévolat associatif représente un engagement de 23 % de la population française, en proportion égale chez les hommes et les femmes.
En termes de classe d’âge, ce sont majoritairement les moins de 35 ans et les plus de 65 ans qui s’engagent en associations. Quant à leur profil social, on remarque une fracture associative durable : ce sont les plus diplômés qui s’engagent le plus4 .
Toutefois, cet important volume de bénévolat est concentré sur une minorité de bénévoles. Un tiers seulement des bénévoles assure 80 % du volume total du bénévolat5 .
La crise liée au COVID-19 a provoqué d’importants mouvements dans le bénévolat associatif. Tout d’abord, une baisse significative a été enregistrée par France Bénévolat, le volume de bénévolat est passé de 24 % en 2019 à 20 % en 20226 .
Rappelons qu’en 2020, 56 % des associations sans salarié et 62 % des associations employeuses avaient subi des interruptions d’activité longues, que ce soit du fait d’interdictions administratives ou de difficultés à appliquer les consignes sanitaires7 .
L’augmentation du bénévolat en 2023, qui atteint 23 %, est principalement le fait de la reprise des jeunes. Toutefois, ils se sont majoritairement réorientés vers du bénévolat direct et informel8 au détriment du bénévolat encadré par des structures. Ensuite, une tendance à la hausse est celle du bénévolat ponctuel, qui regroupe désormais près d’un tiers des bénévoles associatifs. Tous ces bouleversements entraînent des difficultés pour recruter de nouveaux bénévoles et les fidéliser.
De plus, la crise liée au COVID-19 a permis au distanciel de gagner du terrain. 26 % des associations ont vu leurs pratiques numériques s’accélérer avec la crise. Parmi les évolutions positives constatées par les dirigeants de ces associations, on notera une meilleure participation en interne grâce aux échanges à distance pour 61 % d’entre eux9 . Les bénévoles appréciant de s’engager à distance, les demandes de bénévolat à distance explosent, mais peinent à être satisfaites. Selon les dernières études, le télébénévolat ne concerne que 12 % des associations10 .
Des associations et des bénévoles déplorent par ailleurs une perte de convivialité dans cette configuration. Le présentiel reste indispensable, comme le souligne Thierry Prévot, bénévole de Passerelles & Compétences « les gens ont parfois envie et besoin de perdre leur temps »11 . L’engagement associatif, pour beaucoup, est synonyme de lien social. Il permet à ceux qui s’engagent de rompre avec l’isolement en intégrant un collectif.
Valoriser ses bénévoles et répondre à leurs attentes
Les bénévoles ont des attentes particulières en fonction de leur profil social, de leur profession, de leur expérience ou encore de leur savoir-faire.
Laurence Armand, présidente de l’association Passerelles & Compétences, affirme : « S’engager c’est recevoir ». Prendre soin de ses bénévoles passe par leur écoute, la considération de leurs besoins, c’est à la structure de s’adapter à eux. Elle poursuit en insistant sur leur quête de sens : « Le bénévole est par nature volatile : il vient parce qu’il en a envie, mais il peut repartir aussi rapidement. Pour maintenir cette flamme de l’engagement, il est nécessaire de donner un sens à son action et de nourrir le plaisir qu’il peut avoir à s’engager »12 .
D’après une étude de France Bénévolat datant de décembre 202213 , la bonne gestion des bénévoles repose sur 6 piliers :
- Clarification de la mission et de la contribution au projet associatif ;
- Accueil et présentation de la communauté et des projets associatifs ;
- Intégration, écoute et compréhension des attentes réciproques ;
- Découverte du projet collectif et formation si besoin ;
- Animation pour que chacun puisse être acteur ;
- Reconnaissance et valorisation.
Ainsi, travailler avec des bénévoles implique de savoir communiquer pour répondre à ce qu’ils recherchent, et ne pas perdre leur force vive.
Pour conserver cette part majeure de la communauté de l’association, la considération des bénévoles est primordiale. Mais comment parvenir à les impliquer ? Comment appréhender chaque bénévole dans sa singularité ? Cette année à la Fonda m’aura permis d’observer qu’écoute, cohérence, et régularité sont des ingrédients clés pour réussir à « faire ensemble ».
Travailler main dans la main avec des bénévoles s’avère parfois compliqué, de nombreuses embûches peuvent s’immiscer dans le processus de travail. Cela peut être des délais qui s’allongent pour recevoir les productions des bénévoles, ou encore des incompatibilités d’emploi du temps.
En effet, souvent occupés par leur vie professionnelle, les bénévoles n’ont parfois d’autres créneaux que ceux en fin de journée, le week-end ou pendant les vacances. Or, les salariés d’une association comme la Fonda ne travaillent pas — ou de manière exceptionnelle — à ces moments-là.
Une valse quotidienne est opérée, pour parvenir à satisfaire les attentes des deux parties. Les outils de visioconférence s’avèrent ici précieux pour établir des temps de travail flexibles. Les outils de communication en différé, comme les emails, permettent également l’asynchronicité des échanges.
« Assurer le lien » est une expression floue qui ne rend pas hommage au travail colossal accompli par les membres d’une association. L’ensemble de la communauté d’une association déploie un effort intense de communication, en ligne et hors ligne, pour faire circuler l’information et ainsi réussir à « faire ensemble ».
Des canaux de communication comme une newsletter, des réseaux sociaux ou un site internet permettent de relayer les informations pertinentes aux membres d’une association. J’ai animé au cours de cette année le centre de ressources en ligne de la Fonda et ses près de 1200 ressources, pour la plupart gratuites. Ces articles, ces interviews, ces études et événements permettent à tout un chacun de s’informer sur les actions de la Fonda et ses partenaires, mais aussi sur le fait associatif dans sa globalité.
Surmonter les difficultés pour faire ensemble
Applicable à ses programmes comme à son organisation interne, c’est le « faire ensemble »14 qui guide la Fonda.
C’est en impliquant ses bénévoles et en échangeant avec eux d’égal à égal que de véritables progrès sont réalisés.
Ainsi, bien qu’association rime avec petits moyens, la Fonda continue de nourrir de grands projets grâce à ses bénévoles dévoués. Plus d’une centaine de bénévoles constituent la communauté de la Fonda, pour la grande majorité réguliers et impliqués pour le fait associatif. Véritable richesse pour l’association, ces bénévoles épaulent et complètent le travail effectué par l’équipe permanente de la Fonda, composée de huit salariés seulement. Ainsi, satisfaire leurs attentes est presque plus important encore que de répondre aux besoins de l’association.
Écouter leurs conseils et avis, échanger sur l’avenir, réfléchir ensemble, permet de consolider une relation entre une structure et sa communauté. Rompre le dialogue ou même heurter certains bénévoles en étant trop assuré sur la direction à suivre pour le projet associatif de la structure n’engendrerait que du désengagement.
Afin de pérenniser son action, une association reposant autant que la Fonda sur ses bénévoles se doit de prendre soin d’eux. Pour ce faire, la diplomatie et l’écoute sont les clés du succès. La communication est donc une question centrale au sein du tissu associatif français.
- 1Viviane Tchernonog et Lionel Prouteau, Le paysage associatif français, 4e édition, 2023.
- 2Julien Mast et Claire Thoury, « Passer d’une société engagée à une société politisée », Tribune Fonda n°258, juin 2023, [en ligne].
- 3Lionel Prouteau, « Le bénévolat en France en 2017 : État des lieux et tendances », avec le CRA et le CSA, avec l’appui de la Fonda, 2018, [en ligne].
- 4France Bénévolat/IFOP avec l’appui de Recherches & Solidarités, « Les Français et le bénévolat en 2023 », 2023, [en ligne].
- 5France Bénévolat/IFOP, Ibid.
- 6France Bénévolat/IFOP, Ibid.
- 7Viviane Tchernonog et Lionel Prouteau, Ibid.
- 8On distingue le bénévolat informel, appelé aussi bénévolat direct ou de proximité (aide aux voisins, soutien familial, etc.), du bénévolat formel qui s’exerce dans le cadre d’un organisme.
- 9Recherches & Solidarités et Solidatech, La place du numérique dans le projet associatif en 2022, octobre 2022, [en ligne].
- 10Recherches et Solidarités, Enquête Opinion des Responsables Associatifs, 2022.
- 11Laurence Armand, Adeline Mazier et Thierry Prévot (Passerelles et Compétences), « Le bénévolat est la première richesse des associations. » Tribune Fonda N°256, décembre 2022, [en ligne].
- 12Laurence Armand, Adeline Mazier et Thierry Prévot (Passerelles et Compétences), Ibid.
- 13France Bénévolat, « Les 6 piliers des bonnes pratiques de gestion des bénévoles », 2022, [en ligne] .
- 14La Fonda, Guide méthodologique du Faire ensemble, 2022.