→ Télécharger la synthèse
Ressource # 8 Radio chrétienne francophone (RCF), « Les ressorts de l'engagement », Je pense donc j'agis avec Jean-Baptiste Baudier et Claire Thoury, décembre 2022.
Présenté par Agathe Thiebeaux, chargée de communication de la Fonda.
Mots clés : #Engagement #Bénévolat #Évolution
ENSEIGNEMENTS CLÉS
Brève présentation des invités
Je pense donc j’agis est une émission de la radio RCF qui se veut être un plaidoyer pour l’engagement quotidien. Cette émission s’intéresse plus spécifiquement à l’engagement au sein du monde associatif.
Jean-Baptiste Baudier est psychologue de métier. Il est également bénévole chez les Scouts et Guides de France, en tant que responsable de l’équipe nationale « Adulte dans le scoutisme ».
Claire Thoury est la présidente du Mouvement associatif, regroupant près de la moitié des associations de France. Elle est également membre du CESE depuis mai 2021. Sociologue de formation, spécialisée sur les questions de l’engagement, elle a consacré sa thèse en 2017 sur l’engagement des étudiants.
Pourquoi cette ressource ?
Cette ressource nous permet d’approcher les évolutions de l’engagement tout en revenant sur ses définitions, au lendemain de la journée mondiale du bénévolat.
MISE EN PERSPECTIVE AVEC L’ENGAGEMENT
Les raisons de l’engagement
En s’appuyant sur la théorie de l’auto-détermination de Deci et Rayan (1985), des chercheurs en psychologie sociale, Jean-Baptiste Baudier cite les trois ingrédients clés qui poussent à s’engager durablement :
- Le sentiment d’autonomie, d’avoir la liberté de peser dans les décisions et les choix de l’association,
- Le sentiment de connexion sociale,
- Le sentiment de compétence, de progresser chaque jour un peu plus.
Claire Thoury ajoute que l’engagement est l’expression par des mots ou des actes d’une indignation, d’une colère ou d’une envie. Une vision trop normative de l’engagement ne correspond pas à la réalité. Il existe une multitude de raisons et de manière de s’engager. En observant les parcours des bénévoles, on remarque une articulation subtile entre quête de sens et quête d’épanouissement.
Claire Thoury en distingue trois grandes phases de la transformation de l’engagement :
- Après la seconde Guerre Mondiale, le triomphe de l’engagement militant ;
- Au début des années 1970, avec le tournant de l’individu, connaissant son apogée à la chute du mur de Berlin et avec la fin des grandes idéologies ;
- Actuellement, avec l’engagement des très jeunes pour des grandes causes (transition écologique, égalité femme-homme, accueil des réfugiés, etc.).
Les deux invités de l’émission insistent ensuite sur le fait que les lieux d’engagement bénévole comme les associations diffèrent du cadre classique (scolaire, académique, familial ou professionnel). S’engager dans une association qui répond à notre indignation en défendant certaines valeurs que nous incarnons permet de trouver du sens et de sortir de ces cadres souvent inadaptés. Le bénévolat permet l’apprentissage par l’expérience et véhicule une conception de la réussite différente, renforçant la confiance en soi.
Il n’y a pas de mauvais d’engagement, de mauvaises raisons ou de mauvaise structure. Il faut s’émanciper de ce type de discours trop normatif. Claire Thoury a défini dans sa thèse 6 types d’engagement, dont « l’engagement pansement ». Certains s’engagent comme moyen d’évitement de leur vie personnelle ou professionnelle (traumatisme par exemple). Tous les engagements sont précieux. Cependant, Jean-Baptiste Baudier souligne que l’engagement soumis à certaines pressions externes, comme celle des parents obligeant leurs enfants à rejoindre les Scouts, ne permet pas de nourrir l’individu.
Dans sa thèse, Claire Thoury a défini six types d'engagements étudiants :
- L'engagement pansement
- L'engagement de cause
- L'engagement « charité chrétienne »
- L'engagement à vocation professionnalisante
- L'engagement en réponse aux « épreuves identitaires » : liens amicaux et éducation non formelle
- L'engagement sacrificiel
Un bénévolat plus jeune
La question de l’absence de rémunération est abordée avec le témoignage d’une auditrice. Les deux invités ont des visions différentes du fait de leurs parcours. Claire Thoury insiste pour ne pas opposer salariés et bénévoles, chacun ayant un rôle à jouer. Toutefois, elle met l’accent sur les inégalités présentes au sein du monde de l’engagement, qui n’est pas accessible à tous. En effet il faut du temps et des moyens pour être bénévole.
La majorité du bénévolat de gouvernance est assuré par des retraités. Or, depuis la crise liée au COVID-19, ils souhaitent davantage profiter de leur temps libre et passer la main aux autres générations. Mais la tendance à l’augmentation du bénévolat chez les jeunes se dirige plus dans celui d’actions/ de projets que dans celui de gouvernance.
Une évolution notable dans les formes d’engagement repose sur la désaffection des structures au profit de la cause. Avant (dans les années 1970), on sacrifiait son individualité pour un collectif défendant une cause. Aujourd’hui, les bénévoles préfèrent changer de structure que de se plier à tout.
L’engagement favorise le lien social
Jean-Baptiste Baudier souligne que l’attribution de rôles est essentielle au bon fonctionnement associatif. Par exemple, au sein de son association, des lettres de missions sont données à chaque nouveau bénévole, définissant ses missions et le temps qui lui sera demandé. Prendre soin de ses bénévoles passe donc par leur écoute et par la considération de leurs besoins et de leurs attentes. La structure doit s’adapter à eux.
L’engagement associatif permet de construire un lien social, et de répondre à certaines situations d’isolement. Le monde associatif est à la fois la force du premier et du dernier kilomètre (l’organisation d’individus venant du terrain, faisant émerger des propositions directement des intéressés et l’organisation associative sur certains territoires délaissés comme dernier recours).
L’articulation du monde associatif avec l’État et les pouvoirs publics
L’action associative doit être complémentaire avec celle de l’État. La plupart du temps, les associations font différemment de ce qui aurait pu être fait par l’État, et font émerger des innovations, comme par exemple le service civique. Toutefois, il ne faut pas qu’elles soient seules à intervenir, l’État social doit se montrer plus fort que ce qu’il est actuellement selon Claire Thoury.
Ressources pour aller plus loin
- Claire Thoury, L’engagement étudiant dans un monde d’individualisation : construction identitaire et parcours politiques, 2017.
- Lionel Prouteau, Rapport de recherche « Bénévolat et bénévoles en France en 2017, état des lieux et tendances », 2018.
- Recherches & Solidarités, « La France associative en mouvement », octobre 2022.
→ Télécharger la synthèse
Ce compte-rendu a été rédigé par Hannah Olivetti, relu par Yannick Blanc pour la Fonda et mis en page par Agathe Thiebeaux. Il est mis à disposition sous la Licence Creative Commons CC BY-NC-SA 3,0 FR.