L’intérêt général caractérise l’intervention d’un grand nombre d’associations. Cependant, le contexte économique, tant au plan national qu’européen, fragilise la situation de certaines d’entre elles et par la même celle des personnes auxquelles elles s’adressent. Le Ministre de la ville, de la jeunesse et des sports a sollicité le Haut Conseil à la vie associative afin qu’il conduise une réflexion sur la notion d’intérêt général attachée aux associations. Il s’agit de préciser son contenu en abordant tous les aspects, social, économique, européen et de repérer les critères les plus pertinents pour qualifier les organismes et leurs activités d’intérêt général. L’objectif final étant de sécuriser l’activité des associations dans un contexte concurrentiel.
Où en est-on de l’intérêt général aujourd’hui ?
Le HCVA a brossé un tableau rapide de l’évolution de la notion d’intérêt général et constaté que si la définition de celui-ci est resté longtemps le monopole de l’État, force est de constater qu’il partage aujourd’hui cette prérogative avec d’autres acteurs au premier rang desquels les associations elles-mêmes.
En effet, compte tenu de la diversité de leurs interventions, les associations, et avec elles d’autres organismes comme les fondations et les fonds de dotation, sont légitimes à revendiquer leur contribution à la vie sociale, culturelle, éducative … en un mot à l’intérêt général.
Le périmètre de l’intérêt général conditionné par le marché
Au cours de la seconde moitié du XXème siècle, un autre acteur s’est toutefois invité au débat, sans que ni l’État ni les associations ne l’aient véritablement sollicité : le marché est en effet aujourd’hui devenu le principal déterminant de l’espace réservé à l’intérêt général.
Selon certains économistes, le marché doit produire naturellement l’intérêt général : «la concurrence qui permet que le prix de chaque bien et service s’établisse au niveau de son coût marginal, est une condition nécessaire à la réalisation de l’intérêt général» (extrait de l’audition de Frédéric Marty). L’article 102 du traité, relatif à la concurrence, et l’article 106, relatif aux aides d’État, en sont la traduction : «il s’agit ici de faire reposer la décision relative à une compatibilité de la mesure avec le traité sur un critère de correction des défaillances du marché» (idem).
Au final, la multiplication d'opérateurs privés sur des segments d'activités occupés jusque-là par les seules associations sans but lucratif, génère de nouveaux marchés, contraignant celles-ci à justifier de leur intérêt général à court terme, faute de quoi elles se condamnent soit, à devoir s'inscrire dans une logique d'appels d'offres, dans le cadre de marchés publics - et il n'est pas dit que les usagers gagnent au change - soit à abandonner les soutiens dont elles disposaient en raison précisément du fait que leur action était considérée jusque-là comme d'intérêt général.
Quelles propositions ?
Il est apparu nécessaire au HCVA de faire des propositions de nature à identifier les organismes d’intérêt général afin de révéler leur plus value par rapport aux autres acteurs et de sécuriser leur situation.
Il n’existe pas de définition précise de l’intérêt général et la complexité du concept appelle davantage l’élaboration d’un faisceau d’indices permettant de qualifier d’intérêt général un organisme et ses activités.
C’est pourquoi, à partir de travaux antérieurs et des auditions auxquelles il a procédé, le Haut Conseil a dressé une liste de critères et d’indices s’appliquant aux structures et aux activités.
Il a ensuite constaté, à partir de nombreux exemples, que les services de l’État pouvaient avoir entre eux une appréciation différente de l’intérêt général d’un même organisme ou de deux organismes oeuvrant dans le même domaine, qu’il en allait de même des services des collectivités et que ces divergences d’approche créaient une grande insécurité pour l’ensemble des associations ou fondations concernées.
Il lui parait donc de la plus haute importance de parvenir à harmoniser les points de vue et de faire en sorte que les services appelés à se prononcer sur un dossier puissent avoir une appréciation consensuelle de la qualification à donner à l’organisme concerné et à ses activités.
A cet effet, le HCVA s’est dit opposé à la création d’un nouvel agrément que se surajouterait à ceux existant et irait à l’encontre de l’effort de simplification engagé par les pouvoirs publics.
Il propose en revanche trois scénarii qui permettraient de sécuriser, à des degrés divers, les associations d’intérêt général, ainsi que leurs activités. La qualité d’intérêt général pourrait être reconnue :
- Soit par un avis émis par une commission composée de façon plurielle (différentes administrations, associations, collectivités territoriales) ; il pourrait être recouru aux commissions départementales de la jeunesse, des sports et de la vie associative ou aux commissions régionales consultatives du fonds de développement de la vie associative dont la compétence et la composition pourraient être révisées. Celles-ci pourraient être saisies par une association ou une administration. Ces avis s’imposeraient à tous et pourraient faire l’objet d’un recours devant une commission nationale ;
- Soit par un service compétent dans le cadre de l’examen d’une demande et après avis de l’ensemble des administrations concernées par cette demande ;
- Soit à l’occasion de la contestation par l’administration de l’intérêt général d’une association, cette dernière pouvant former un recours devant une commission habilitée et composée selon les mêmes modalités que dans le premier scénario. Le HCVA laisse l’administration se prononcer sur la pertinence de chacun des scénarii, sa faveur se portant sur le premier.