La mission de l’Éducation nationale est de conduire, dans un souci d’éthique et d’équité, chaque élève au maximum de ses potentialités et de ses possibilités, et d’apprendre à tous à vivre ensemble dans le respect de la reconnaissance des droits et de la spécificité de chacun, particulièrement ceux qui sont habituellement marginalisés ou exclus des systèmes scolaires. L’école a le devoir de garantir le droit à l’égalité des chances pour tous. Elle est appelée à assurer la réussite de tous les apprenants à travers la définition d’un cadre commun et la mise en place des dispositifs qui permettent d’apporter des réponses différenciées aux difficultés et handicaps de toute nature.
Les instances internationales comme l’Unesco recommandent la mise en place des cadres nationaux règlementaires mais aussi des dispositifs favorisant la scolarisation des élèves handicapés. Trois repères importants dans l’agenda international ont marqué cet engagement : l’Éducation pour tous (EPT) à l’horizon 2005, les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) à l’horizon 2015 et les Objectifs de développement durable (ODD), ou Agenda 2030.
Partant du constat selon lequel les personnes handicapées en particulier n’ont pas été suffisamment prises en compte dans les deux premiers agendas, les Nations unies, dans le programme intitulé « Transformer notre monde : l’Agenda 2030 pour le développement durable », ont décliné dix-sept objectifs universels, bénéfiques à tous, afin que nul ne soit laissé de côté. Le handicap est pris en compte dans quatre domaines parmi lesquels l’éducation, avec l’ODD n°4 qui promeut une éducation de qualité inclusive et équitable dans le but d’assurer un accès égal à tous les niveaux d’enseignement pour les enfants vulnérables, parmi lesquels notamment les enfants en situation de handicap.
Handicap, de quoi parle-t-on ?
Selon l’OMS, « Le handicap est un terme générique utilisé pour désigner les déficiences, les limitations d’activités et les restrictions de participation. Il désigne les aspects négatifs de l’interaction entre un individu (avec un problème de santé) et les facteurs contextuels de cet individu (facteurs environnementaux et personnels). »
L’Association d’aide à l’éducation de l’enfant handicapé (AAEEH) comprend le handicap dans sa dimension sociale, en le considérant comme résultant de l’interaction entre une personne et l’environnement dans lequel elle vit. Pour parvenir à l’inclusion et à la participation sociale, pleine et entière, de la personne, il faut égaliser les opportunités de réalisations offertes aux individus afin d’asseoir l’idée de justice.
L’égalité des chances
Dans le domaine éducatif, l’égalité des chances consiste à veiller à ce que la situation personnelle et/ou sociale d’un individu ne soit pas un obstacle à la réalisation de son potentiel éducatif. Elle vise à assurer à tous les jeunes, quelles que soient leurs caractéristiques individuelles ou leurs appartenances culturelles et sociales (genre, statut socio-économique, handicap…), un niveau de formation générale élevé, garant d’une insertion professionnelle et sociale réussie et d’un accomplissement personnel.
Ainsi l’AAEEH considère qu’il est important d’égaliser l’ensemble des conditions et des moyens visant à engendrer le bien-être et/ou la réussite des enfants en situation de handicap. En effet, l’éducation est un facteur puissant de l’autonomisation des personnes handicapées.
Le droit à l’éducation
Ce droit est reconnu à tous les individus depuis la Déclaration universelle des droits de l’homme, en 1948, qui stipule que « Toute personne a droit à l’enseigne ment primaire gratuit et obligatoire. »
Trois dimensions sont essentielles à la réalisation de ce droit :
- le droit à l’accès à l’éducation qui consiste à créer et rénover les installations scolaires qui prennent en compte les questions telles que le genre ou le handicap ;
- le droit à l’accès à une éducation de qualité qui vise à garantir à tous les enfants une possibilité de réussite ;
- le droit au respect de l’environnement d’apprentissage qui revient à fournir des environnements d’apprentissage sécurisés, inclusifs et efficaces.
Le droit à l’éducation pour les enfants en situation de handicap est réaffirmé par des conventions internationales ratifiées ou souscrites par l’État et les lois nationales. Parmi celles-ci figurent : la Convention relative aux droits de l’enfant de 1989 (article 29), la Convention relative aux droits des personnes handicapées de 2006 (article 24), les Objectifs de développement durable annoncés en 2015 (ODD n°4) et les lois de 1975 et du 11 février 2005 pour « l’égalité des droits et des chances, la citoyenneté et la participation des personnes handicapées ».
La prise en compte des enfants handicapés à l’école en France
Différentes étapes ont marqué la prise en compte des élèves handicapés à l’école en France. Au départ, un déni d’éducabilité menait à l’exclusion totale de l’enfant handicapé du système scolaire. Ensuite, il y a eu une phase de ségrégation durant laquelle l’enfant handicapé était accueilli dans des écoles ou instituts spécialisés selon le type de handicap, puis une phase d’intégration avec une inscription scolaire mais sans réelle prise en compte des besoins éducatifs spéciaux de l’élève.
Actuellement, la politique est à l’inclusion, c’est-à-dire à l’acceptation et à la reconnaissance de l’enfant handicapé comme élève ayant de droit sa place à l’école, et pour qui le système scolaire doit tout mettre en œuvre afin de faciliter l’insertion, la participation et la réussite scolaire en milieu ordinaire.
La loi du 11 février 2005 a marqué une étape décisive dans cette transition en envisageant le handicap dans sa dimension sociale et en érigeant comme principes l’accessibilité à tout pour tous et l’égalisation des droits et des chances. La politique éducative est orientée vers l’inclusion. Selon le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, « l’école a vocation d’accueillir tous les enfants quels que soient leurs besoins ». Il revient ainsi à l’école de s’assurer que l’environnement est adapté à la scolarité de l’élève quels que soient ses besoins, et au service d’éducation de veiller à l’inclusion scolaire de tous les enfants sans distinction.
Malgré cette volonté politique affichée, des freins existent à l’accès à l’école pour les élèves handicapés. Ils se déclinent sous diverses formes : exclusion, inaccessibilité, absence de prise en compte réelle des besoins et projets des élèves handicapés.
Les situations qui nous sont remontées sont les suivantes : le caractère non-systématique de l’inscription de l’élève handicapé dans son établissement de référence ; l’exclusion de l’élève handicapé des activités extrascolaires ; l’absence de prise en compte réelle des besoins et projets des élèves handicapés, la divergence entre la notification de la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CADPH) et les moyens mis en œuvre ; l’absence de projet personnalisé de scolarisation (PPS) ; la subordination de l’accueil de l’élève handicapé ou son inscription à la présence d’un accompagnant ; le refus d’accueil d’un élève handicapé ; le manque de préparation des enseignants à l’accueil d’élèves handicapés ; le manque de coopération avec le secteur médico-éducatif
Aujourd’hui, l’accès à l’école est limité pour les enfants handicapés. En cause, une sensibilisation insuffisante, un nombre limité d’enseignants adéquatement formés et un défaut d’équipements et de ressources pédagogiques adéquates. Pour garantir un accès égal à l’école pour tous les enfants, il faut agir à travers des actions de sensibilisation aux besoins des enfants handicapés et plaider pour un renforcement des moyens mis en œuvre.
L’AAEEH mène ainsi des actions individuelles et collectives avec ses partenaires pour l’appropriation des enjeux de l’éducation pour les personnes handicapées de manière générale et la scolarisation des enfants en particulier. Elle accompagne les familles dans leurs démarches et se mobilise aux côtés des autres acteurs de l’école, des institutions et des familles pour trouver des solutions adaptées.
Malgré les avancées dans la prise en compte du handicap dans la politique éducative depuis la loi de 2005, l’accès à l’école pour les enfants concernés n’est pas toujours acquis en France à cause des freins et obstacles qui se dressent sur le chemin de leur scolarisation en matières d’accessibilité, d’accueil et de partage d’information. Les établissements spécialisés sont essentiels dans cette transition vers l’école inclusive, car ils possèdent une expertise et des ressources précieuses.
La politique de mise en œuvre des Objectifs de développement durable, par la prise en compte des questions liées au droit pour tous à une éducation de qualité et à la lutte contre les inégalités (ODD n°4 et 10), offre une nouvelle opportunité pour faire avancer le droit à l’éducation vers plus d’égalité des chances.
Mais l’égalité de droit garantit-elle l’égalité des chances ? Quelle place y a-t-il pour les enfants handicapés dans un monde de plus en plus compétitif ?
Références bibliographiques
- OMS. (2001). Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé. CIF. Genève, Organisation mondiale de la Santé.
- ONU. (1989). Convention relative aux droits de l’enfant. New York / Genève : Organisation des Nations unies.
- ONU. (2006). Convention relative aux droits des personnes handicapées. New York / Genève : Organisation des Nations unies.
- République française (2005), Loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
- SEN, A. (1992). Inequality reexamined. New York: Russell Sage Foundation.
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