Se nourrir, un débat citoyen
En 2019, le taux de pauvreté national était établi en France à 14,6 % soit 9,2 millions de personnes1 . La crise sanitaire liée au COVID-19 a exacerbé cette situation.
L’association VRAC, le Secours catholique, le Réseau Cocagne, celui des Centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (CIVAM) et l’Union nationale des groupements des épiceries sociales et solidaires (UGESS) se rassemblent alors pour porter un programme national : Territoires à Vivre-s.
L’État leur alloue un mandat et un budget pour structurer des coopérations d’acteurs autour de la démocratie alimentaire sur quatre territoires sélectionnés : Lyon, Toulouse–Haute-Garonne, la métropole Aix-Marseille et Montpellier2 .
Le projet Territoire à Vivre-s Montpellier nait ainsi fin 2021. Son objectif : la mise en place d’une caisse alimentaire commune portée par un comité citoyen. Pour Pauline Scherer, sociologue membre du pôle recherche & expérimentation du projet, « le coeur du projet est ce débat citoyen sur la qualité de l’alimentation. »
La question est éminemment politique : il s’agit de penser l’accès à l’alimentation dans un contexte de précarité alimentaire et de nécessaire transition des pratiques alimentaires et agricoles pour des alternatives plus durables.
Un comité citoyen de l'alimentation
Le comité citoyen est constitué fin 2022. Il se compose aujourd’hui de 61 citoyens qui se réunissent une fois par mois. Le comité a décidé dans un premier temps du fonctionnement et de la gestion de la caisse alimentaire. Le budget est généré par des cotisations citoyennes, des fonds publics et privés. Le montant des cotisations lui, est spécifiquement établi selon des grilles de revenus.
Le comité travaille aussi à la mobilisation des habitants de la métropole de Montpellier : en recueillant le point de vue des habitants et en leur proposant de participer au projet de caisse alimentaire. Pauline Scherer souligne ainsi « une grande satisfaction de la part du comité citoyen […] Ils vivent une vraie expérience humaine ».
Le comité citoyen identifie également de potentiels lieux d’achat à conventionner, développe des outils de logistique coopératifs et structure des filières d’approvisionnement durables et locales. La caisse alimentaire repose sur une mutualisation de moyens entre 25 organisations montpelliéraines.
Une expérimentation grandeur nature
Depuis la création du comité citoyen, le projet est suivi par un dispositif scientifique. Il s’intéresse à plusieurs axes d’observation : les effets sur les habitants, leurs pratiques, leur pouvoir d’agir et la citoyenneté autour de l’alimentation…
Un premier rendu de résultats sera présenté en juin 2024 suivi des résultats finaux à l’automne 2024. Pour l’heure, la récolte de données n’est pas suffisante pour tirer des conclusions, mais des effets du projet s’observent au sein du comité citoyen. Pour Pauline Scherer, il y a une véritable « reprise d’espoir sur la capacité à créer des lieux où le pouvoir citoyen peut s’exercer. »
Si la caisse alimentaire commune pourrait à terme s’articuler avec des politiques publiques, la structure souhaite avant tout ne pas perdre la place des citoyens dans ce projet.
- 1Insee, « L’essentiel sur… la pauvreté », Statistiques et études, 12 juin 2023, [en ligne].
- 2Lire à ce sujet Pauline Scherer (VRAC & Cocinas) et Marco Locuratolo (Fédération régionale des CIVAM d’Occitanie), Dossier de présentation caisse alimentaire commune - Territoire à Vivre-s Montpellier, Octobre 2022, [en ligne].