→ Télécharger la synthèse
Ressource #11 La responsabilité territoriale des entreprises, par Maryline Filippi, aux Éditions Le Bord de L'eau, 2022, 218 pages.
Présenté par Maryline Filippi, professeure d'économie, chercheuse associée et rédactrice-en-chef de la Revue internationale de l'économie sociale (RECMA).
Mots clés : #Responsabilité #Entreprise
ENSEIGNEMENTS CLÉS
Brève présentation de l'autrice
Maryline Filippi est spécialiste des coopératives agricoles, développement territorial et responsabilité des entreprises.
Elle enseigne l'économie à Bordeaux Sciences Agro et est chercheuse associée à l'INRAE AgroParisTech Paris Saclay. Depuis 2022, elle est rédactrice-en-chef de la Revue internationale de l’économie sociale (RECMA).
Pourquoi cette ressource ?
La notion de responsabilité territoriale des entreprises (RTE) est récente. Elle a été notamment mentionnée dans un avis sur la responsabilité territoriale de la Plateforme RSE de France Stratégie1 , mais sans clairement être définie. Pour éclairer ce concept, un collectif de chercheurs s’est constitué sous la direction de Maryline Filippi.
Suite à des ateliers de travail entre des chercheurs, ils ont publié l’ouvrage La responsabilité territoriale des entreprises en octobre 2022. En parallèle, des ateliers collectifs avec des acteurs de terrain ont abouti à la rédaction d’un livre blanc sur la RTE par la Chaire TerrESS, dirigée par Timothée Duverger, en novembre 202222 . »
MISE EN PERSPECTIVE AVEC L’ENGAGEMENT
Pour répondre aux enjeux territoriaux, où en sommes-nous ?
Dans un contexte de changement climatique et d’accroissement des inégalités socioéconomiques, il est indispensable de changer de paradigme dans les modes opératoires des différents acteurs, dont les entreprises, du territoire. L’ancrage territorial3 constitue un point central.
Si la responsabilité sociétale des entreprises (RSE)4 représente un ensemble de pratiques managériales – reposant sur le volontariat – elle est de plus en plus contrainte pour les grandes unités par la réglementation.
La RSE prend en compte les dimensions économiques, sociales et environnementales. Toutefois, elle ne garantit pas une stratégie d’ancrage territorial des entreprises avec les collectivités territoriales et les parties prenantes externes (comme les citoyens) pour qu’elles soient pleinement impliquées dans la création de valeur durable sur le territoire.
Quant aux structures de l’économie sociale et solidaire (ESS)5 , elles ont davantage une logique d’ancrage dans leur écosystème. Cependant, la notion d’ancrage territorial est discutée pour certaines structures, notamment les grandes entités. Il peut parfois être nécessaire d’activer cet ancrage pour être à l’écoute des membres et de leurs besoins sur le territoire. Le développement d’une gouvernance démocratique peut être une piste.
Par ailleurs, la prise en considération de l’environnement demeure un point d’amélioration de l’ancrage territorial des structures de l’ESS, alors même qu’il est un des facteurs majeurs de changement.
Il apparaît nécessaire d’avoir une nouvelle approche de la responsabilité des entreprises pour créer une dynamique globale et créer ensemble une valeur durable sur le territoire : la responsabilité territoriale des entreprises.
La norme de référence de la RSE, ISO 26000, est basée sur le volontariat et le déclaratif des entreprises. Elle repose sur sept piliers :
- La gouvernance de la structure
- Les droits humains
- Les conditions et relations de travail
- La responsabilité environnementale
- Les questions relatives au consommateur et à la protection du consommateur
- Les communautés et le développement local
- La loyauté des pratiques
En quoi consiste la responsabilité territoriale des entreprises ?
C’est au niveau des territoires que les acteurs peuvent trouver des solutions pour faire face aux crises actuelles, répondre aux besoins des personnes et reconstruire la société. Il est nécessaire de faire territoire pour l’entreprise avec les autres acteurs, dont les collectivités territoriales et les parties prenantes externes. Telle est la philosophie de la responsabilité territoriale des entreprises.
Elle propose un ancrage territorial aux entreprises avec leur écosystème afin d’identifier collectivement les besoins concrets des communautés locales et d’y répondre ensemble. Il s’agit d’un mode d’entreprendre en commun et en responsabilité pour le bien commun.
La démarche de Territoires zéro chômeurs de longue durée ou bien encore celle des Pôles territoriaux de coopération économique en sont des exemples. La coopération territoriale constitue le ciment de la RTE entre toutes les parties prenantes, supposant de sortir d’une approche en silos des problèmes.
Pour autant, cela n’exclut pas les conflits, ni les risques ou d’exclusion ou d’appropriation de ressources par un acteur ou un groupe d’acteurs. Il s’agit de processus de co-construction qui doit associer le plus grand nombre de parties prenantes.
Quatre critères font la différence entre la RSE et la RTE selon Maryline Filippi :
- La dimension collective et coopérative plutôt qu’une logique individuelle
- La valeur crée et partagée, fruit de l’interdépendance de l’entreprise et de son territoire
- La coopération, ESS et entreprises conventionnelles pour l’intérêt des personnes . Les entreprises génèrent de la valeur économique et aussi sociale et sociétale
- La nécessité de nouveaux indicateurs avec le renouvellement des partenariats public-privé
Source : Chaire TerrESS, La responsabilité territoriale des entreprises, 2022.
Que permet la responsabilité territoriale des entreprises ?
Grâce à sa logique intrinsèquement collective, la RTE prend en compte l’écosystème de l’entreprise dans toute sa diversité, en y incluant notamment le vivant, les plantes ou bien encore les animaux, et ainsi contribuer à tendre vers un bien-être collectif.
La RTE constitue un cadre propice au déploiement d’innovations sociales. Tous les moyens sont à mobiliser, voire à coconstruire, pour bâtir des solutions sur le territoire. Cela suppose de ne pas avoir de solution préconçue. La RTE a dans son ADN un droit à l’expérimentation.
Quelles perspectives de recherche ?
Quatre pistes de recherches sur la RTE sont identifiées :
- Territoire pour Faire société, utopies … ? Le « génie des lieux » !
- Institutionnalisation via le territoire ?
- Évaluation : de l’impact à la création de valeur ?
- Territoire comme faire ensemble, « faire société », vers les communs ?
Ressources pour aller plus loin
- Chaire TerrESS, La responsabilité territoriale des entreprises, 2022.
- La Fonda, Quelle création de valeur ?, 2022.
- Maryline Filippi, La responsabilité territoriale des entreprises, 2022.
→ Télécharger la synthèse
Ce compte-rendu a été rédigé par Hannah Olivetti, relu par Maryline Filippi et mis en page par Agathe Thiebeaux pour la Fonda. Il est mis à disposition sous la Licence Creative Commons CC BY-NC-SA 3.0 FR.
- 1Plateforme RSE, Avis « Vers une responsabilité territoriale des entreprises », juillet 2018. Disponible à ce lien : https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/2018_07_12_-_rse-vers_une_responsabilite_territoriale_des_entreprises_finalweb.pdf
- 2Chaire TerrESS, Livre blanc, La responsabilité territoriale des entreprises, novembre 2022. Disponible à ce lien : https://www.cress-na.org/wp-content/uploads/2022/12/Le-livre-blanc-de-la-RTE-1.pdf
- 3L'ancrage territorial des entreprises comprend les interactions avec le territoire sur lequel elles opèrent dans une perspective de performance économique. (cf. note n°2)
- 4La RSE peut se résumer comme l’ensemble des pratiques mises en place par les entreprises dans le but de respecter les principes du développement durable (social, environnemental et économique). (cf. note n°2)
- 5Définie dans la loi dite Hamon, 2014, « l’économie sociale et solidaire est un mode d’entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l’activité humaine auquel adhèrent des personnes morales de droit privé qui remplissent les conditions cumulatives suivantes : un but poursuivi autre que le seul partage des bénéfices, une gouvernance démocratique, etc. Parmi les structures de l’ESS, il existe les mutuelles, les coopératives, les associations… »