Engagement

Les revendications d’APF France handicap pour les (jeunes) aidants

Tribune Fonda N°263 - Jeunes aidants : engagés de fait ? - Septembre 2024
APF France handicap
Et Anna Maheu
Créée en 1933 par des jeunes atteints de poliomyélite, l’association nationale APF France handicap défend les droits des personnes handicapées et de leurs familles. Elle gère également plus de 550 délégations, établissements et services médico-sociaux. Depuis les années 2000, l’association a intégré la question des proches aidants à son plaidoyer comme à son accompagnement des structures affiliées.
Les revendications d’APF France handicap pour les (jeunes) aidants
Extrait du rapport Repérer les jeunes aidants © Marion Detuncq/Handéo

LES AIDANTS AU SEIN D’APF FRANCE HANDICAP 

« Des proches aidants, jeunes et moins jeunes, ont toujours gravité autour de notre association, qu’il s’agisse de parents d’enfants en situation de handicap, d’enfants de parents handicapés ou de fratries », pose d’entrée de jeu Bénédicte Kail, la conseillère nationale éducation familles d’APF France handicap. 

Néanmoins, les expériences et les besoins de ces aidants ne deviennent un sujet en tant que tel qu’en 2006, avec la publication des premières revendications pour les aidants de l’alors Association des paralysés de France (APF)1

« L’APF revendiquait surtout le libre choix du mode de vie et l’amélioration des conditions de vie quotidienne des familles, sans aborder la diversité des aides apportées2 » selon Bénédicte Kail. 

« Les quotidiens d’un lycéen dont la mère souffre d’un cancer, du conjoint d’une personne en proie à des troubles psychiques et du parent d’un enfant polyhandicapé n’ont pourtant rien à voir. » 

DES ÉTUDES POUR PENSER L’AIDE 

En 2013, l’APF lance donc une enquête sur la charge de l’aidant, tous âges confondus3. Il s’agit de la première étude qui distingue l’aide en fonction du niveau de charge. En 2017, l’association s’associe à une seconde étude avec Novartis et Ipsos, interrogeant spécifiquement les jeunes de 13 à 30 ans4

En 2006, l’alors Association des paralysés de France (APF) publie ses premières revendications pour les aidants.

Sur la base d’une autre enquête sur le vécu des aidants, APF France handicap publie en 2019 son plaidoyer renouvelé Aidantes, aidants familiaux : pour le libre choix d’aider et la reconnaissance de leur rôle5 

Dans la continuité de ces travaux, l’association rejoint en 2020 la recherche participative menée par Handéo sur les jeunes aidants6. Le premier volet, « mieux connaitre », est suivi de la parution d’un livret Repérer les jeunes aidants7 pour outiller les professionnels.

REPAIRS AIDANTS, UNE FORMATION ET UN RÉSEAU POUR ALLER PLUS LOIN 

À la suite des deux études de 2013 et 2017, les établissements, services et délégations d’APF France handicap interpellent le réseau national sur la façon d’intégrer ces réflexions à leurs actions. Une troisième enquête est alors lancée en interne pour identifier leurs besoins. Ceux-ci s’avèrent être une animation de réseau et l’expérimentation d’un programme qui pourrait être décliné localement. Le programme RePairs Aidants naît donc en 2017. 

Construit avec APF formation, il s’agit d’un programme d’information et d’orientation à destination des aidants. Des formations gratuites sont animées par un aidant et par un professionnel qualifié. Depuis son lancement, 1 321 aidants familiaux ont ainsi participé à ce programme soutenu par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). 

Pour animer le réseau APF France handicap, seconde demande des structures affiliées, une salariée organise cinq webinaires par an. À chaque webinaire, deux structures présentent leurs actions pour les aidants. 

Un Institut d’éducation motrice (IEM) peut y revenir sur le groupe de parole pour les fratries qu’il met en place, comme APF Évasion peut y présenter les séjours de vacances adaptés pour l’ensemble de la famille. « Cela permet aux différentes structures de se nourrir des apprentissages des unes et des autres », précise Bénédicte Kail. 

POUVOIR NE PAS AIDER 

Si APF France handicap se félicite du chemin parcouru en matière de prise en compte de l’aide, avec notamment des avancées concrètes comme les points de bourse8 et les aménagements de scolarité pour les jeunes aidants9, l’association porte des revendications plus radicales. 

Tout d’abord, l’association demande un élargissement de la définition des aidants, avec une reconnaissance des aidants de personnes malades. En matière de reconnaissance légale, les aidants n’existent aujourd’hui que dans deux chapitres du code de l’action sociale et des familles : celui sur les personnes handicapées et celui sur les personnes âgées10

D’un point de vue légal, les aidants de personnes malades ne sont donc pas reconnus, alors que cela peut concerner jusqu’à un tiers des situations selon les dernières études sur les jeunes aidants (34 %)11

« Parmi les jeunes interrogés au cours des années, j’ai été marquée par la proportion d’enfants aidants principaux d’une mère avec un cancer du sein », se souvient Bénédicte Kail.

« Dans ces situations, comme les maladies psychiques non diagnostiquées ou les addictions, les jeunes n’ont aucun droit, car la personne qu’ils aident n’entre dans aucune case légale. » 

Par ailleurs, « la première chose dont a besoin un aidant, jeune ou non, c’est de pouvoir cesser d’aider. 

La première chose dont a besoin un aidant c’est de pouvoir cesser d’aider.

Et cela passe obligatoirement par des accompagnements adaptés pour leur proche », martèle Bénédicte Kail. La première revendication de l’APF France handicap pour tous les aidants est donc que l’aide reste un choix.

  • 1L’Association des paralysés de France (APF) s’est renommée en mars 2018 APF France handicap.
  • 2APF France handicap, « Conférence de la famille 2006 : l’APF pour une réelle reconnaissance des aidants familiaux », 26 juin 2006, [en ligne].
  • 3Association des paralysés de France (APF), Une nouvelle approche des aidants familiaux : enquête sur la charge de l’aidant familial ou proche aidant, octobre 2013, [en ligne].
  • 4Novartis-Ipsos, « Qui sont les jeunes aidants aujourd’hui en France ? », octobre 2017.
  • 5APF France handicap, Aidantes, aidants familiaux : pour le libre choix d’aider et la reconnaissance de leur rôle, octobre 2019, [en ligne].
  • 6Lire à ce sujet Handéo « Les jeunes aidants. Une recherche participative pour construire un guide de sensibilisation. », 2019, [en ligne].
  • 7Handéo, Repérer les jeunes aidants, novembre 2021, [en ligne].
  • 8Depuis la rentrée 2023, les étudiants aidants d’un parent en situation de handicap ont un accès favorisé aux bourses sur critères sociaux grâce à un supplément de 4 points de charge.
  • 9Depuis 2019, les étudiants aidants peuvent bénéficier du régime spécial d’études (RSE) et ainsi bénéficier d’aménagements d’études comme l’étalement de leur cursus dans le temps, une dispense d’assiduité à certains cours, la mise à disposition de cours en ligne ou de prises de notes réalisée par un autre étudiant.
  • 10Le proche aidant d’une personne âgée est défini dans l’article L. 113-1-3 du Code de l’action sociale et des familles quand l’aidant familial d’une personne handicapée est défini dans l’article R. 245-7 du Code de l’action sociale et des familles.
  • 11MACIF/Crédoc, L’aidance des jeunes de 16 à 25 ans, 28 septembre 2023, [en ligne].
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