Comprise au sens d’accès au réel et d’accès à la vérité par l’accumulation des observations de faits, grâce au « big data », et par l’augmentation de la capacité de traitement de ces observations, bien au-delà des moyens ordinaires ; cette forme d’intelligence tend à privilégier une partie de la réalité, celle qui se manifeste par des signes, ce qui a pour effet d’éliminer ou de rendre insignifiante toute réalité qui ne se traduit pas ainsi.
Par une série tant d’affirmations qui pourront paraître péremptoires que d’illustrations, l’auteur essaie de mettre en évidence les formidables conséquences possibles du développement de l’intelligence artificielle, d’abord sur l’intelligence humaine, - sans même aller jusqu’aux manipulations génétiques, « il est possible que la cohabitation avec l’intelligence artificielle accroisse nos capacités cognitives » -, mais aussi sur la santé et la manière de soigner, et surtout sur le contenu et les modes d’acquisition du savoir.
Il évoque, en effet, son impact, dès maintenant et à terme, sur l’école et la fonction d’enseignement qui doit aller dans le sens d’une beaucoup plus grande personnalisation. Ses outils rendent possible l’adaptation aux caractéristiques de chacun. Il souligne, au passage, les dysfonctionnements de la fonction en France et son inadéquation aux nouvelles réalités.
De nouvelles possibilités générées par l’intelligence artificielle et la capacité de les réguler sont aussi évoquées. Dans quelle mesure la distribution des pouvoirs entre les États va-t-elle dépendre de leur capacité à accumuler des données ? Quelles en seront les conséquences sur le niveau d’inégalité entre les pays et les catégories sociales ? Qu’implique le constat que les capacités de l’intelligence artificielle rendent impossible son contrôle par le cerveau humain ? Quels seront les effets des transformations culturelles induites par les nouveaux moyens donnés aux individus ? Quels degrés de liberté leur resteront-ils ? Beaucoup d’hypothèses sont formulées sans être toutefois pondérées par leur probabilité d’occurrence.
Ayant noté que « l’intelligence artificielle n’est pas encore dotée d’une conscience artificielle », l’auteur – et c’est rassurant - termine par une recommandation à ses enfants : « Soyez suffisamment forts pour ne pas vous laisser berner par les utopies mortifères… Les transhumanistes sont en train de gagner la bataille des cœurs : il leur faudra des contre-pouvoirs. Soyez partie prenante de ce débat fondamental : l’humanité ne doit pas se transformer sans débat philosophique et politique. »
Dr Laurent Alexandre, La guerre des intelligences.
Paru 2017, aux éditions JC Lattès.
339 pages.
