Les choses évoluent dans le paysage de la livraison à vélo : la plateforme Just Eat France embauche désormais ses coursiers en CDI, par exemple, tandis que des livreurs décident de quitter les plateformes pour créer leurs propres coopératives de cyclologistique. Le concept essaime partout en France : à Bordeaux avec les Coursiers bordelais, à Nantes avec Naofood et Coursiers nantais, à Grenoble avec Sicklo & Toutenvélo, à Strasbourg avec Kooglof, à Paris avec Olvo, et dans bien d’autres villes.
Ce succès s’explique par l’amélioration des conditions de travail des livreurs en leur offrant le statut de salarié et la prise de décision collective concernant le fonctionnement et l’avenir de la coopérative. Pour s’émanciper des start-up, les coursiers peuvent créer leurs propres applications de cyclologistique en s’appuyant sur le logiciel CoopCycle, co-créé par un groupe de bénévoles depuis 2016. Ce projet numérique donne aux livreurs à vélo les moyens de gérer eux-mêmes leurs courses et seules les entreprises coopératives peuvent s’en servir à des fins commerciales.
Progressivement, face aux importants besoins partagés par les coopératives de coursiers à vélo, l’équipe de CoopCycle a élargi ses actions pour devenir une fédération internationale des coopératives de livraison à l’automne 2017. L’objectif est de permettre aux membres de mutualiser des services pour réduire leurs coûts et d’ainsi créer des économies d’échelle.
Concrètement, les coopératives ont accès au logiciel CoopCycle qui facilite la gestion des courses pour les livreurs, tout en étant un espace de cybercommerce pour les clients. Les coopératives peuvent également bénéficier de services facilitant leur fonctionnement interne dont la négociation au niveau de la fédération d’offres d’assurance, la réponse à des appels à projets nationaux, voire européens, la gestion de la comptabilité, de la paie et des factures, ou bien encore l’organisation de formations1 .
Aujourd’hui, CoopCycle comprend une trentaine de coopératives en France et à peu près autant dans d’autres pays (en Belgique avec Molenbike ou RAYON9, en Espagne avec La Pájara, Shift Delivery Co-op au Canada ou encore Hotlines courriers en Australie etc.) Les membres participent à la gouvernance démocratique de la fédération. Ils déterminent collectivement par exemple le niveau de cotisation des membres, l’allocation des ressources aux services prioritaires ou bien encore les partenaires économiques à venir.
La transformation du jeune secteur de la livraison à vélo reflète celle de notre rapport collectif au travail. D’un côté, le développement de la « gig economy », fondé sur une parcellisation des emplois et le statut d’autoentrepreneur, et de l’autre les travailleurs qui reprennent possession de leur outil de production !
- 1Plusieurs formations sont proposées par Coopcycle à ses membres : une formation professionnelle (au métier de la livraison, à la sécurité, au commercial, etc.) et une formation à la vie et à l’économie des coopératives.