L’association Coup de Pouce a développé, à partir d’une recherche-action menée par Éliane et Gérard Chauveau, à Colombes, un programme baptisé « Clé » (clubs lecture-écriture). Il consiste à réunir tous les soirs de leur année scolaire, après la classe, des enfants inscrits au CP dont les enseignants considèrent en début d’année qu’ils présentent des fragilités susceptibles de parasiter leur apprentissage de la lecture.
Ces enfants sont regroupés par cinq (en un « club ») pour réaliser pendant une heure et demie des activités ludiques autour de la lecture et de l’écriture, activités qui pourraient être conduites dans la famille si celle-ci se sentait en capacité ou en disponibilité. Le club ne refait ni la classe après la classe, ni de soutien scolaire stricto sensu.
L’action de Coup de Pouce consiste en un accompagnement périscolaire bienveillant, assuré par un animateur qualifié, qui vise à ce que chaque enfant prenne confiance dans ses capacités d’apprentissage et trouve goût et plaisir dans les activités de lecture et d’écriture qui lui sont proposées quotidiennement. Il s’agit également d’un accompagnement péri-familial, pour que les parents des enfants accompagnés prennent eux aussi confiance en leurs capacités d’éducateurs.
Un engagement formel des parents est nécessaire, par le biais de contacts réguliers, d’une participation à certaines séances du club et par la circulation de cahiers, livres et jeux entre le club et la maison. Pour Coup de Pouce, les conditions de réussite scolaire d’un enfant supposent que le triangle éducatif qui relie l’enfant, sa famille et son enseignant soit solide et équilibré avec des relations de confiance et de respect entre les acteurs.
Aujourd’hui, l’association propose trois autres formats de clubs, en plus du « Clé » qui reste son programme-phare : le « Cla » (club langage) déployé en grande section de maternelle, le « Clém » (club lecture-écriture-mathématiques) déployé en CE1, et le « Cli » (club livres) pour des enfants de CP scolarisés en écoles REP et REP+1 .
Au total, ce sont près de dix mille enfants qui sont accueillis cette année scolaire dans un peu moins de deux mille clubs, répartis dans deux cent trente villes de France (métropole et outre-mer) avec une majorité d’entre eux dans les écoles inscrites dans les REP.
Une politique de réussite éducative, portée par une communauté d'acteurs
Les parties prenantes du projet sont les acteurs du triangle éducatif : enfant, enseignant, parent. Mais pour opérer les clubs, un deuxième triangle est indispensable : le triangle institutionnel qui relie l’association avec l’Éducation nationale et les municipalités. En effet, ce sont les communes qui mettent en œuvre les clubs, en recrutant les animateurs. Ceux-ci peuvent être des enseignants, des étudiants, des retraités, ou encore des animateurs de centres de loisirs. Les écoles quant à elles identifient les enfants qui participeront aux clubs, obtiennent l’engagement des familles et fournissent les locaux, ce qui suppose un engagement fort de la direction de l’établissement et le soutien de son Inspection académique.
C’est donc un véritable réseau d’acteurs que l’association mobilise, le rôle de Coup de Pouce étant de fournir l’ingénierie des dispositifs, la formation des animateurs et autres acteurs (coordinateurs enseignants dans les écoles, pilotes municipaux), les bilans de fin d’année et les ressources pédagogiques pour le fonctionnement des clubs.
L’association s’inscrit ainsi dans une logique qu’elle a, elle-même, contribué à inspirer : celle de la politique de réussite éducative, promue dans le cadre de la loi de cohésion sociale de 2005 dans les quartiers dits de « Politique de la ville ».
Depuis vingt-cinq ans, nous avons accompagné cent trente mille enfants. C’est à la fois beaucoup et peu quand l’on sait que, chaque année, près de 20 % des élèves en cursus élémentaire arrivent en sixième avec une maîtrise très insuffisante de la langue écrite. Les bilans et évaluations conduits par l’association indiquent que l’action a permis à quatre enfants des clubs sur cinq en moyenne d’éviter un décrochage précoce.
Le sens du projet de Coup de Pouce s’incarne dans sa complémentarité avec l’action de l’Éducation nationale, dont l’association salue la décision de dédoubler les classes en CP et CE1 dans les écoles des REP et REP + pour favoriser une pédagogie plus active et une attention plus individualisée.
Mais l’effort ne peut pas se limiter à la salle de classe, surtout pour les enfants les moins accompagnés en dehors de celle-ci. L’activité sur le temps péri- et extra-scolaire est essentielle. Beaucoup de municipalités en ont pleinement pris la mesure en l’inscrivant dans leurs projets éducatifs territoriaux (PEDT) articulés avec les projets menés au sein de l’école.
En outre, dans ce contexte, Coup de Pouce entend agir de concert avec d’autres associations qui proposent des activités sportives ou d’éveil artistique pour favoriser l’épanouissement de l’enfant dans ses différentes dimensions. Le « Plan Mercredi »2 2, par exemple, peut être un bon support d’expérimentation de ces nouvelles formes de partenariats.
Dans la même logique, Coup de Pouce souhaite compléter son accompagnement collectif en club par un accompagnement scolaire individuel à la maison les années suivantes, en coordination avec d’autres associations. Cette coopération des associations combinant leurs modes d’intervention et leurs champs d’expertise pour apporter une réponse globale aux besoins locaux est la clef de voûte du concept des cités éducatives qui doivent progressivement se mettre en œuvre dans les quartiers prioritaires de la ville.
Partout sur le territoire national, en zones d’éducation prioritaire ou non, en milieux urbains, périurbains ou ruraux, il y a urgence absolue à enrayer la spirale infernale de la fracture sociale et territoriale qui se nourrit des inégalités scolaires et les amplifie. Nous sommes résolument prêts à nous mobiliser dans cet objectif comme acteur responsable et solidaire de la lutte pour une réelle égalité des chances.
En savoir plus sur Coup de Pouce : www.coupdepouceassociation.fr
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- 1Réseau d’éducation prioritaire (REP) et Réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP+).
- 2Ce plan, présenté en juin 2018 par le ministre de l’Éducation nationale, la ministre de la Culture et la ministre des Sports, vise à développer une offre périscolaire aux élèves de primaire avec des activités de grande qualité le mercredi.