D’après une enquête de France Assos Santé, seulement 11,4 % des représentants des usagers ont été intégrés aux cellules de crise des établissements de santé pendant l’épidémie de COVID-191 .
Un constat sombre pour la démocratie sanitaire dans sa dimension représentative.
Pourtant, sur le terrain, la participation des usagers est un facteur de progrès pour le système de santé.
À AIDES, les personnes vivant avec le VIH et les hépatites ainsi que celles issues de communautés fortement exposées à ces épidémies inventent des lieux pour mieux prendre soin de leur santé sexuelle.
Difficulté voire impossibilité de parler de son orientation sexuelle, de ses pratiques et de ses éventuelles consommations de produits à son médecin traitant, multiplication des refus de soins subis par les personnes vivant avec le VIH, besoin de lieux accueillants et accessibles pour se dépister aussi souvent que nécessaire, etc. : autant de motivations pour l’association à créer des centres de santé sexuelle communautaire.
Les centres de San Francisco et Londres ont servi d’inspiration. En rendant notamment accessible la Prep (prophylaxie préexposition, prise de traitements antirétroviraux associés à des dépistages réguliers), ils ont contribué à faire reculer le nombre de contaminations au VIH dans la communauté gay.
La complémentarité est évidente entre les actes de soins et l’accompagnement proposé par AIDES, ancrés dans la durée et sur les enjeux de prévention/ promotion de la santé, et ceux des professionnels de santé souvent centrés sur le soin et le seul temps de la consultation. Les partenariats sont d’autant plus constructifs qu’ils s’inscrivent dans une logique gagnant-gagnant, dans une complémentarité exempte de concurrence et reposant sur une reconnaissance réciproque et préalable de la plus-value de l’autre.
Mais quel est le modèle financier à adopter pour faire vivre ces lieux autant tournés vers la prévention que vers le soin?
Aujourd’hui, avec trois lieux, le 190 à Paris — géré par AIDES — et les centres de santé sexuelle communautaire de Marseille et Montpellier, le modèle prend forme et démontre son efficacité.
Les pouvoirs publics qui, il y a moins de vingt ans, doutaient de la possibilité d’acteurs communautaires de mener un dépistage, nous reconnaissent la pleine capacité à être aux manettes de tels lieux. Cependant, pour l’instant, les financements ne sont garantis que le temps de l’expérimentation et l’avenir reste incertain. Espérons que les enseignements de la crise liée au COVID-19 aient été tirées et la leçon retenue : rien pour nous, sans nous.
Un entretien de Martine Horel et David Tardé / Moderne Multimédias pour Solidarum.org / CC BY-NY-SA 3.0
- 1France Assos Santé, « Vivre-COVID-19 », juin 2021.