Depuis décembre 2020, le transport ferroviaire de voyageurs a été ouvert à la concurrence totale, une opportunité pour de nouveaux acteurs des rails, dont la première coopérative ferroviaire française, Railcoop. Jusqu’ici, la SNCF était à la fois propriétaire des réseaux ferrés de France et aussi leur principale exploitante. Railcoop, parmi d’autres, veut tirer parti de ce réseau ferroviaire que la SCNF n'utilise pas au maximum de sa capacité.
À sa création, en 1937, la SNCF a en effet récupéré les 42 700 km de voies ferrées. Héritant d’un réseau très dense, la société nationale choisit de l’alléger, avec un plan de fermeture d’environ 20 000 km de lignes qui s’achève à la fin des années 1970. Les fermetures de ligne hors des axes Paris-Province ou entre grandes villes ont continué, ce qui fait qu’aujourd’hui, un tiers des gares ne sont plus desservies1 . Si les lignes sont maintenues, les autocars remplacent les trains, un moyen de transport à l’empreinte carbone bien plus importante.
Dans un contexte de dérèglement climatique, le train est pourtant un maillon essentiel de la transition écologique en cours. Le secteur des transports est le principal émetteur de C02 en France, avec 39 % des émissions totales de GES (hors UTCF2 ). La route représente plus de 80 % des consommations d’énergie finale de ce secteur, quand la part de l’aérien est de 15 % et celle du ferroviaire n’est que de 2 %3 .
Alors que 90 % des Français vivent à moins de dix kilomètres d’une gare4 , la coopérative ferroviaire Railcoop naît en novembre 2019 pour redonner vie aux gares abandonnées. Elle propose d'ouvrir des lignes de train hors des axes déjà desservis par la SNCF.
En juin 2020, la coopérative a déclaré à l’Autorité de régulation des transports son projet de faire de nouveau rouler des trains de voyageurs sur la ligne Bordeaux-Lyon, arrêtée en 2014 au profit du TGV. La mise en place du service est prévue pour l’été 2022 et elle desservira neuf villes moyennes comme Libourne, Limoges, ou encore Montluçon. Si les voyageurs sont au rendez-vous, Rennes-Toulouse et Lyon-Thionville devraient être les prochaines lignes. Une ligne de fret Railcoop devrait quant à elle ouvrir dès le second semestre 2021 pour proposer des services mutualisés aux entreprises du nord de l’Occitanie.
Pour sa première ligne, Railcoop vise un trafic d’au moins 690 000 voyageurs par an avec un prix qui sera fixé aux alentours de 38 euros, aligné sur celui d’un covoiturage. Le temps de trajet, évalué à 7 h, est néanmoins plus long que celui du trajet actuel par la SNCF qui, avec une correspondance à Paris, reste en dessous de 5 heures pour la modique somme de 75 euros en moyenne, sans carte de réduction et pour la semaine suivante.
Afin d’appartenir à ses sociétaires, Railcoop a adopté le statut de société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) : une forme de coopérative qui associe salariés, usagers, entreprises locales et collectivités. L’ensemble des sociétaires prend les décisions sur le modèle « une personne = une voix », et au minimum 57,5 % des bénéfices doivent être réinvestis dans l’entreprise. Grâce à ses plus de 5 600 sociétaires, la coopérative a atteint un capital d’un million d’euros. Parmi eux, des citoyens, des cheminots, mais aussi des collectivités locales comme la commune de Gannat, qui sera desservie par la ligne Bordeaux-Lyon, la communauté de communes de Saint-Pourçain-Sioule-Limagne, le département de la Creuse, la communauté d’agglomération du Libournais, etc. L’ensemble des parties prenantes d’une ligne ferroviaire est donc associé au sein de la structure.
Une centaine de ces sociétaires travaillent sur les prochains services que Railcoop pourra développer, dont de nouvelles lignes, mais aussi des trains de nuit. Après avoir atteint les 1,5 million d’euros de capital minimum pour avoir le droit de circuler sur le réseau ferré, l’objectif de la société est à présent d'obtenir la licence ferroviaire et le certificat de sécurité.