Au mois d’avril dernier, l’Union européenne annonçait une feuille de route ambitieuse en faveur du climat, visant à réduire d’au moins 55 % d’ici à 2030 le niveau de CO2 émis — comparé au niveau de 1990 — pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Les États-Unis, de leurs côtés, revenaient dans l’accord de Paris à la suite de l’élection du président Joe Biden, qui lançait, ce même mois d’avril, un sommet sur le climat pour marquer la détermination de la première puissance mondiale à (re)prendre pleinement sa part dans le concert des nations.
Tant mieux, car la bataille du climat est, sans aucun doute, l’urgence silencieuse prioritaire à mener pour rester sous le seuil des 1,5 °C de réchauffement global d’ici la fin du siècle, alors même que ce seuil risque d’être atteint dès 2024 !
Nombreux sont les collectifs à se mobiliser pour accélérer la prise de conscience, porter des plaidoyers ou encore manifester leur impatience face à ce défi planétaire. Le climat agit désormais comme une sorte d’affectio societatis : il transcende les générations, les origines ou encore les parcours professionnels. Le changement climatique est d’ailleurs devenu « une urgence mondiale » qui nécessite des réponses « urgentes et globales » selon deux tiers des personnes interrogées lors d’un sondage réalisé par l’ONU dans 50 pays1
.
L’articulation des aspirations citoyennes et des agendas politiques reste pourtant chaotique. L’exemple de la Convention citoyenne pour le climat en est une cinglante illustration : la traduction des propositions en texte de loi a plus que déçu ses participants et la promesse de referendum sur le climat qui en découlait s’évapore à mesure que l’échéance présidentielle approche. Le politique peine encore à traduire la volonté populaire en actes concrets et tangibles pour en rester aux promesses et intentions, bien loin des aspirations profondes d’une très large partie de la société.
Pour autant, prenons garde à ne pas focaliser notre énergie sur le seul climat ; il n’est qu’une dimension de l’environnement. Perte de la biodiversité, déforestation intensive, disparation de terres arables, extractions à outrance de matières premières… sont autant d’atteintes graves à l’environnement. Pour la seule population des vertébrés, le WWF pointe ainsi le déclin de plus de 68 % des populations en moins d’un demi-siècle, par la seule responsabilité de l’Homme2 . Jamais, dans une durée si courte, une seule espèce — la nôtre — n’aura si durablement porté atteinte à l’intégrité de la planète.
Les conséquences en sont désastreuses. La crise liée au COVID-19 a clairement démontré la réalité des interdépendances, entre le monde animal, les activités humaines et la nature. Avec des conséquences parfois inattendues, puisque chaque Français ingère l’équivalent d’une carte bleue de plastique par semaine alors même que notre corps ne sait pas se débarrasser de cette matière étrangère3 .
Une des clés de la protection de l’environnement repose sur la science (et sur l’innovation) pour apporter des réponses de court terme. Malheureusement, elle est trop souvent dévoyée de son sens premier. Le doute, qui est l’essence même d’un esprit critique (« je ne sais pas donc je cherche à comprendre »), et la maîtrise d’un corpus de connaissances, qui le structure, semblent désormais s’exclure l’un l’autre. Or, la science est intrinsèquement une combinaison des deux.
Alors que les fake news se délectent de la confusion entre activisme, opinions et démonstrations, la science cherche simplement à démontrer. Il ne s’agit donc pas d’un combat de « la vérité », mais « des vérités » qui, par nature, évoluent sur la base de nouvelles connaissances. Pour autant, jamais les scientifiques n’ont aussi précisément décrit les conséquences de la destruction de notre environnement.
Ces dernières années ont démontré les difficultés du débat, et les confinements successifs ont renforcé l’isolement engendrant une radicalité de plus en plus forte. Pourtant, la succession de crises qui s’amoncellent devant nous devrait nous forcer à une mise en œuvre rapide de l’Agenda 2030. Ces 17 ODD sont un cadre pour une mise en mouvement dans lequel chacun est appelé à agir ensemble. Ils sont aussi un rappel que, aussi urgents que soient les combats climatiques et environnementaux, ils ne peuvent être décorrélés des urgences sociales.