Dans ces conditions, notre sociologue a bien du mal à y voir autre chose qu’un artefact, une identité construite et prescrite d’en haut, à défaut d’être vécue et expérimentée. En effet, les enquêtes statistiques ou qualitatives disponibles concluent à l’inconsistance sociologique de ce nouveau rôle social de citoyen(ne) européen(ne), peu connu et donc très peu pratiqué, ne procurant qu’un principe d’identification bien flou et ne s’accompagnant d’aucun senti- ment positif. Par exemple, un Eurobaromètre « flash » réalisé en 2010 sur la citoyenneté européenne montre que seulement 43 % des personnes interrogées donnent un sens minimal à ce statut et que seules 32 % d’entre-elles se sentent informées à son égard.
Au-delà de ce constat rapide, on s’attardera dans ce texte sur plusieurs dimensions de ce qu’engage concrètement être citoyen(ne) européen(ne) : s’y impliquer politiquement, tant rationnellement qu’émotionnellement ; et exercer concrètement les droits de mobilité que ce statut procure. Cela nous amènera à proposer ensuite un certain renversement analytique pour voir que la citoyenneté européenne n’est pas tant un statut donné d’en haut qu’un objet à construire par en bas ; et là réside sans doute une vraie responsabilité collective pour les associations.
Une citoyenneté politique et vécue ?
La participation politique est la clé d’entrée la plus attendue et la plus facile à saisir pour appréhender cette citoyenneté européenne au concret puisque nous disposons, en la matière, de travaux très nombreux et de données très riches. Les citoyens européens peuvent en effet participer à la vie de l’UE indirectement à travers le Conseil (puisqu’ils ont élu les chefs d’État ou de gouvernement) et directement à travers le Parlement puisqu’ils en élisent depuis 1979 les membres sur des mandats supposément européens.
Or il s’avère que sur le premier point, la démocratie continue à s’enraciner et à s’expérimenter dans les espaces nationaux, selon des logiques et des enjeux qui leur sont propres : les vies politiques nationales restent en effet essentiellement organisées par les partis politiques nationaux qui tendent à occulter la question de l’UE, jugée trop sensible pour leur cohérence interne et peu relayée par des médias qui la jugent peu vendable ; et que sur le second point, le bilan reste loin d’être conforme aux attendus démocratiques : d’une part, le taux d’abstention aux élections européennes ne cesse de croître et atteint en moyenne 60 % ; d’autre part, ces scrutins sont souvent détournés de leur dimension européenne pour être organisés et perçus selon des enjeux strictement nationaux.
Le jeu politique national est d’autant plus structurant que les attitudes des citoyens à l’égard de l’Europe restent peu consistantes. Celle-ci demeure à leurs yeux une «bien aimée mal connue», une réalité lointaine et floue, vécue plutôt positivement dans son principe mais suscitant davantage de réserves, voire de craintes, sur le détail. Entre les années 1960 et 1990, on parle de consensus permissif pour rendre compte de la façon dont les citoyens perçoivent et évaluent le processus de construction européenne : s’ils sont majoritairement d’accord avec le principe d’intégration, ils en délèguent les modalités aux élites, jugeant la question trop complexe.
À partir du Traité de Maastricht, ce consensus semble se briser, des craintes se cristallisent et les opinions des citoyens à l’égard de l’Europe s’avèrent désormais plus complexes : si le niveau de soutien exprimé en faveur du processus d’intégration reste majoritaire dans les années 2000, il évolue généralement à la baisse, traduisant la montée d’une défiance à l’égard de l’Europe, laquelle se polarise sur quelques événements saillants (guerre du Kosovo, crise de la vache folle, scandales sanitaires ultérieurs, Traité constitutionnel en 2005, etc.) et se fixe sur certaines figures repoussoirs (le « bureaucrate bruxellois », le « plombier polonais », etc.).
Au-delà de ce portrait général, de nombreuses enquêtes permettent d’évaluer la consistance et l’architecture sociologique du sentiment européen. Au niveau national, qui reste le plus prédictif des opinions à l’égard de l’UE, le processus d’intégration trouve le plus de partisans au sein des États anciennement intégrés à l’Europe institutionnelle ou l’ayant fait dans des contextes politiques favorables (Luxembourg, Allemagne, Pays-Bas, Espagne…) ; à l’inverse, il suscite moins de soutiens populaires au sein de pays ayant rejoint plus tardivement l’UE ou l’ayant fait dans des conditions défavorables (Hongrie, Autriche, Royaume-Uni). Au niveau individuel, l’europhilie est le fait de catégories diplômées, aisées, occupant des emplois qualifiés ou à haute responsabilité et intéressées à la chose politique ; à l’inverse, l’euroscepticisme se retrouve plutôt dans les catégories populaires, peu diplômées, employées dans des secteurs ou des professions peu valorisées et peu politisées. D’un point de vue plus idéologique, l’Europe suscite l’opposition aux extrêmes ou en dehors de l’échiquier politique tandis qu’elle est acceptée à la fois à gauche et à droite.
On voit bien que la citoyenneté de l’Union engage en fait des ressorts plus profonds. Cette question de l’identification et des sentiments est en effet fonda- mentale pour cerner l’apparition d’une communauté citoyenne : le citoyen européen est, verticalement, le sujet d’une communauté politique constituée d’institutions et de règles ; il appartient surtout, horizontalement, à une communauté humaine constitutive d’un « nous » élargi. Que l’on pense d’ailleurs à la phrase attribuée à Jean Monnet : « Nous ne coalisons pas des États, nous unissons des hommes. » Or, en tant que support d’appartenance à un ensemble humain, où valeurs et sentiments appuient la connaissance rationnelle de la vie politique et où les autres sont des concitoyens et non plus des étrangers, il reste à constater que pour l’heure, l’Union coalise seulement des États.
Les enquêtes montrent que l’extension de la confiance entre Européens (avec, qui plus est, des différences nationales en fonction de la proximité géographique et culturelle) ne s’accompagne pas encore de sentiments particuliers de sympathie. On ne trouve ainsi la trace d’un sentiment de fraternité, d’empathie, de communauté, d’esprit de corps entre les populations européennes que dans certains espaces sociaux restreints et sur des enjeux singuliers (par exemple, certains sports, l’enseignement supérieur, les jumelages de communes, certains réseaux de politiques publiques européennes, etc.). Sans doute en raison d’une carence en symboles et parce que l’UE peine toujours à se représenter comme un « tout » qui puisse solliciter l’allégeance de ses parties, l’Europe n’est donc pour l’heure que l’objet d’une évaluation rationnelle et froide, dépolitisée et réservée aux élites ; tandis que les identifications et les sentiments de concitoyenneté restent enchâssées dans les frontières nationales, notamment parce que la socialisation politique des individus reste réalisée dans des systèmes éducatifs nationaux, avec des langues vernaculaires.
Une immigration européenne dorée ?
Si on la considère au-delà des représentations, c’est-à-dire à partir de l’exercice concret des droits de mobilité qu’elle institue (résidence et vote dans un autre État membre), la citoyenneté européenne prend maintenant quelque consistance sociologique, même si cela n’est repérable que dans un espace social finalement très étroit. En effet, pas plus de 2 % seulement des habitants de l’UE vivent dans un autre pays que celui dont ils ont la nationalité. L’immobilité des autres 98 % d’Européens doit en effet tant aux nombreux retards dans la mise en œuvre des droits afférant à la mobilité (reconnaissance des diplômes, portabilité des régimes de retraite, droit de vote aux élections locales, etc.) qu’à des effets de structure plus généraux (la convergence des économies réduit les incitations à quitter son pays natal mais surtout, comme nous l’avons vu, la résistance des identités nationales freine l’identification à l’UE).
Qui plus est, la mobilité européenne a un coût et peut même, selon certains socio- logues, accroître les inégalités sociales, en plus de donner une nouvelle forme au cosmopolitisme des catégories socioprofessionnelles supérieures. Nécessitant la détention de ressources financières, linguistiques et sociales, il s’agit en effet d’un processus sélectif qui permet aux élites qu’il consacre d’engranger des profits de distinction – « ouverture internationale » étant ici synonyme de « modernité ». Les « Eurostars », pour reprendre le terme du sociologue Adrian Favell, c’est-à-dire ceux qui mettent concrètement en œuvre les droits de mobilité attachés à leur citoyenneté européenne en s’installant dans certaines villes particulièrement attractives (les « Eurocities »), sont ainsi majoritairement des cadres, souvent assez jeunes, avec un niveau élevé d’éducation. Ils parlent deux ou trois langues, lisent The economist ou The Financial Times, et sont plus susceptibles de soutenir le projet d’intégration européenne. C’est dans de tels microcosmes qu’une « société européenne » pourrait se dessiner.
À cet égard, les enquêtes montrent pourtant que le contact entre Européens tend plutôt à favoriser l’usage des stéréotypes hérités des pays d’origine ainsi que des sortes de régression vers les habitus nationaux. Pour nos Eurostars, la réussite sociale, économique et surtout psychologique de la migration entreprise repose en fait sur une intégration des codes de la culture nationale et urbaine d’accueil ; mais qu’elle n’en évacue pas pour autant le souvenir et la nostalgie du pays de départ, synonymes de confort et de sécurité lorsque les freins à l’installation dans la nouvelle vie se font ressentir (barrières linguistiques, difficultés de se trouver un logement ou des soins de santé adéquats, exclusion des réseaux sociaux existant, etc.). S’il ne fait donc aucun doute qu’une élite sociale particulièrement mobile s’est développée en lien avec l’intégration européenne dont elle profite des structures d’opportunité professionnelle ou autre (emplois mieux rémunérés à Londres, tolérance à Amsterdam, soleil à Barcelone…), cette élite ne forme pas une classe sociale consciente d’elle-même, susceptible d’agir comme un acteur politique.
D’autant plus que ces populations s’avèrent peu mobilisées électoralement. Les (trop rares) travaux disponibles sur le vote des citoyens européens installés dans un État membre autre que le leur à l’occasion des scrutins européens et locaux montrent en effet que, là aussi, les difficultés d’intégration politique dans les pays hôtes, mais surtout les nostalgies nationales, constituent autant de freins à l’exercice pratique de cette citoyenneté européenne de mobilité. La Commission européenne estime déjà que seuls 11,6 % des résidents communautaires s’inscrivent sur les listes électorales de leur pays d’accueil pour les élections européennes (même si le taux d’inscription ne cesse de croître dans plusieurs pays). Mais sur- tout, une très large majorité de ces populations préfère, à l’occasion de ces scrutins, voter dans le pays d’origine (que ce soit physiquement, dans les consulats et ambassades ou bien par procuration), parce qu’ils en maîtrisent davantage les codes et les listes. Quant à l’exercice du droit d’éligibilité, il reste l’exception – permettant très rarement d’envoyer au Parlement européen un résident élu dans un pays autre que le sien.
La citoyenneté européenne comme objet toujours à construire
Au total, le citoyen européen reste bien introuvable. D’où la nécessité de déplacer la question de la citoyenneté européenne comme rôle social vers celle de la citoyenneté européenne comme principe de mobilisation. Cela amène notamment à sou- ligner la contribution des associations et des organisations non gouvernementales (ONG) à la fabrique de ce citoyen européen. Cette perspective quelque peu décentrée d’analyse de la citoyenneté européenne, considérée non pas comme un objet juridiquement et politiquement stabilisé qui serait dès lors seulement utilisé mais plutôt comme un ensemble de normes encore ouvertes à la controverse, bref comme un possible à investir, déplace ainsi la question de la citoyenneté européenne vers la notion plus large de « société civile européenne » qui lui sert à la fois de principe de structuration et d’étendard. Agrégat particulièrement hétérogène et instable, cette dernière est en effet un construit social porté dans les années 1990 par quelques réseaux associatifs qui tentent de la définir, concurrentiellement à d’autres délimitations (notamment de la part de grands lobbys économiques), et dont la réussite réside dans la reprise de cette labellisation par certains acteurs institutionnels (comme la Commission, le Comité économique et social ou le Parlement européen). Cette « société civile européenne » serait ainsi constituée de plusieurs formes de mobilisations qui chacune dessine un visage particulier du « citoyen européen ».
Des mobilisations spécialisées tout d’abord : le lobbying associatif qui se déploie à Bruxelles est particulièrement dense et éclaté. Un ensemble protéiforme et disparate de groupes d’intérêts organisés selon des prismes divers (entreprises, associations, ONG, fondations) se rassemble en effet depuis les années 1990 autour de cet enjeu citoyen, saisissant donc cette nouvelle citoyenneté européenne de manière très segmentée, selon un objet particulier (la mobilité, la reconnaissance d’identités minoritaires, la défense des consommateurs, etc.). Pour éviter une approche seulement sectorielle de ces mobilisations (consistant dans la collection de diverses monographies et l’établissement, à l’aune d’une définition préalable de la « société civile » si le puzzle ainsi constitué compose bien une authentique « société civile européenne »), on peut plutôt s’intéresser aux tentatives entendant représenter toutes les « associations » à l’échelle européenne, quels que soient leurs objets sociaux ou leurs modalités d’organisation et ce, autour d’une figure générique du citoyen européen. Sous cet aspect, deux réseaux spécialisés se distinguent au sens où ils se mobilisent à Bruxelles sur une base transversale, c’est-à-dire autour de la forme associative, de son rôle démocratique et de sa spécificité (construite comme étant à l’articulation entre État et marché) : le Cedag (Comité européen des associations d’intérêt général) et Ecas (Euro Citizens’ Action Service).
La « citoyenneté européenne » se construit en second lieu par des mobilisations idéologiques à travers divers entrepreneurs qui investissent fortement cet enjeu pour doter le processus d’intégration européenne d’un sens axiologique révélé par une grille de lecture politique. Ces groupes se rassemblent ici autour de la citoyenneté européenne en tant que principe (et non plus selon certaines de ses dimensions) et portent un projet à la fois institutionnel et éthique pour (re)fonder l’UE. Outre certaines branches, assez dominées, du mouvement altermondialiste (comme les conférences inter–citoyennes) aboutissant à une lecture très « élevée » de la citoyenneté européenne – élevée car rassemblée autour de grands principes, cette modalité de définition de ce qu’est le citoyen européen caractérise pleinement la mobilisation des réseaux fédéralistes (principalement le Mouvement européen et l’Union pour une Europe fédérale) qui désinvestissent leur ancien thème du « peuple européen » pour celui, plus réaliste, du citoyen de l’Union. Les mouvements fédéralistes voient en effet dans ce thème une opportunité pour faire avancer leur stratégie constitutionnelle, afin de voir établi un cadre politique et fédéral pour la construction européenne – ici, on peut donc lire une conception plutôt institutionnelle de cette citoyenneté européenne, appelée à établir une sorte d’État fédéral de l’Europe selon des ingénieries constitutionnelles précises.
Couronnement de ces différentes formes de mobilisations associatives autour de l’enjeu de la citoyenneté, des formes unitaires de regroupement des associations en Europe se tissent de plus en plus à la fin des années 1990 – unitaires au sens où cette modalité d’intervention additionne et synthétise les précédentes formes de mobilisation (sectorielles, spécialisées et politiques). À cet égard, le Forum permanent de la société civile constitué en 1995 à l’initiative du Mouvement européen international a été le premier réseau à investir la notion (alors plutôt inédite) et à lui proposer une définition ainsi qu’une structure d’accueil. Si dès les années 2000, cette position a été fortement contestée puisque de multiples initiatives visant à définir les contours comme le contenu de la « société civile européenne » émanent de plus en plus de collectifs associatifs, des milieux académiques, de certains think tanks mais surtout d’acteurs institutionnels (essentiellement le Comité économique et social, mais aussi la Cellule de prospective de la Commission) – la multiplication des acteurs politiques investissant la notion constituant sans doute l’indice de la réussite sociale de la catégorie, il n’en reste pas moins que le Forum permanent a activement contribué à son institutionnalisation en lui apportant des premiers standards de définition et des linéaments organisationnels. Il a surtout contribué à déplacer quelque peu la question du « citoyen européen » vers celle de son ancrage organisationnel, à travers le thème des associations et des ONG.
Conclusion
Si le voyage proposé ici part du « citoyen européen » pour arriver à la « société civile européenne », une sorte d’embarras en saisit le terme. Car cette « société civile européenne » est finalement étroite, essentiellement bruxelloise, relative- ment détachée de ses ancrages nationaux ou infranationaux, mais surtout capacitaire au sens où s’y intégrer requiert des ressources importantes (financières, humaines, en expertise, etc.). Est-ce à dire que toute réflexion sociologique sur la citoyenneté européenne serait condamnée à la déception, née de l’écart entre la potentialité de ce statut et sa réalité sociale ? En effet, cette polarisation plus ou moins formelle sur la citoyenneté européenne ne saurait faire oublier les logiques sociales silencieuses à l’œuvre dans les pays de l’UE et qui tendent à constituer une « société européenne » de plus en plus intégrée et homogène mais qui n’a peut-être pas encore pris conscience d’elle-même en se muant en une « société civile européenne ».
Pour le sociologue américain Neil Fligstein, les puissantes forces sociales sur lesquelles repose la construction européenne depuis la fin de la Seconde guerre mondiale ont une réalité forte qu’il ne faut pas sous-estimer. En effet, c’est en identifiant les conditions d’émergence mais aussi les limites de cette société européenne, dont certains linéaments sont tracés par le marché, les pratiques culturelles ou certaines expériences de migration, que l’on sera à même de comprendre ce qui rend les institutions et les politiques de l’UE possibles. Or, ici réside un danger de rupture selon Fligstein, tant la construction européenne tend à renforcer les inégalités sociales et démocratiques qui caractérisent les États en Europe. Une fracture grandissante sépare en effet les gagnants des perdants du processus d’intégration.
Mais surtout, l’intégration européenne tend à scinder et même autonomiser entre eux les espaces du politique : les structures traduisant les choix collectifs des citoyens (le vote, l’animation de la vie politique et du débat public grâce aux médias ou aux partis) restent enchâssées dans les frontières nationales ; à l’inverse, ce qui relève de la fabrique des politiques publiques (la définition des objectifs, la mise en forme juridique des programmes, la sélection des acteurs qui vont mettre en œuvre les décisions, etc.) est de plus en plus localisé à Bruxelles. Il manque donc encore la médiation d’un véritable espace public qui permettrait de faire correspondre le lieu de la décision collective et celui de l’action publique. Tel est sans doute le rôle collectif que peuvent se donner les associations en Europe…
NB Cet article est une version abrégée d’un autre texte :« La citoyenneté européenne comme rôle social.Représentations, pratiques et sentiments », in Construire la citoyenneté européenne de Laure Clément-Wilz et Sylvaine Poillot-Peruzzetto (dir.), éd. Pie Peter Lang, Bruxelles, 2014, p. 27-42.