LA TRIBUNE FONDA N°235
septembre 2017
Revenu universel : cartographie d'une controverse

La Tribune Fonda n°235 explore les controverses liées à l’idée de revenu universel et les enjeux sociétaux que cette idée soulève. 

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Un cas d'école

Édito écrit par
Yannick Blanc
Vice-président de la Fonda

 

Fallait-il, un an après le débat qui a enflammé le début de la campagne présidentielle, revenir sur la question du revenu universel ? Deux raisons nous ont poussé à le faire : la première, c’est la vivacité des débats et la radicalité des oppositions sur ce sujet au sein-même de la Fonda. Nous ne pouvions sortir de cette discussion que par le haut, c’est-à-dire en ayant été au bout des arguments et des analyses.

La deuxième est la conséquence de cette démarche : plus nous nous sommes avancés dans l’analyse des positions et des propositions, plus nous sommes rendus compte que le revenu universel était une réponse apparemment simple à une foule de questions complexes. Le chômage de masse, la précarité, la pauvreté, les mutations du travail et de l’entreprise, l’organisation de la protection sociale, l’économie de la redistribution, la fiscalité, les fondements éthiques de la citoyenneté : le revenu universel n’en finit pas d’ouvrir de nouvelles portes sur de nouveaux labyrinthes.

D’où l’idée d’une cartographie des controverses que nous avons essayé de restituer de la manière la plus lisible possible. Le but recherché n’est pas tant de trouver un équilibre entre partisans et adversaires du revenu universel que d’inviter le lecteur, avant de prendre position, à regarder en face la complexité du sujet.

 

À cet égard, le revenu universel est un véritable cas d’école de l’état de la pensée politique. On peut comprendre que, dans le contexte d’une campagne électorale, les candidats soient contraints d’afficher des positions ou des postures clivantes et simplificatrices. Mais le petit monde très peuplé des experts, des analystes et des commentateurs – des clercs aurait-on dit il y a un siècle – ne s’est pas beaucoup fatigué pour éclairer les enjeux et situer la controverse.

On se soucie plus, là aussi, de consolider des positions que de contribuer à l’intelligence collective… Or il y a non seulement matière à réflexion, comme on le voit dans les pages qui suivent, mais on peut aussi se demander si l’incapacité à affronter la complexité et à élever le débat public n’est pas une cause majeure de l’effondrement du système politique auquel nous avons assisté.


Il n’est aujourd’hui pas de politique publique qui ne se réclame d’une volonté de simplification et tout usager de l’administration ne peut que s’en réjouir. Mais il y a des sujets dont il vaudrait peut-être mieux assumer la complexité avant d’annoncer des mesures, des chiffres et un calendrier. La controverse sur le revenu universel met en lumière ce genre de complexité, elle suggère qu’on ne peut bâtir d’action collective en déclinant une idée simple mais qu’il faut au contraire prendre le temps de mettre au jour les ressorts de la complexité avant d’envisager l’action.

Ainsi, avant de mettre la question du revenu universel au vote, il serait bon, par exemple, de mettre à plat, sous la forme d’une cartographie des faits, des arguments et des finalités, l’écheveau des relations entre rémunérations, prestations sociales et fiscalité ; de s’interroger sur la dimension non monétaire des prestations servies au citoyen et de sa contribution au bien commun ; de réfléchir sans a priori sur les mutations simultanées du travail, de l’emploi, des métiers et des entreprises…


On nous demande parfois s’il est bien utile de s’adonner à la prospective et de proposer de réfléchir à l’horizon 2030 à l’heure où les associations, plus malmenées qu’elles ne l’ont jamais été, se demandent si elles vont passer l’hiver. De toutes façons, disait Keynes, à long terme, nous sommes tous morts. Mais comment livrer la bataille des propositions et des idées avec quelque chance de succès sans vision et sans cap ?

Le président de la République a les siens. Il les a annoncés, argumentés, il les met en œuvre. Il n’est pas nécessaire de contester sa légitimité pour penser qu’il peut y en avoir d’autres et que l’exercice de l’État ne saurait durablement se passer de débats et de controverses. Pour intense qu’il ait été, le débat sur le revenu universel n’a pas épuisé le sujet.


S’orienter parmi les questions qu’il soulève, c’est, pour les associations et pour les citoyens engagés, trouver de nouvelles ressources pour peser sur le cours des choses.